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— Permettez… interrompit Suzette en levant l’index.

— Je ne permets rien. Vous l’avez-t’y débitée, cette énorme menterie ?

— J’ai déclaré, à table, que vous laviez votre beurre dans de l’eau bicarbonatée pour lui enlever son parfum ranci, parfaitement.

— Peut-on ! peut-on ! Ça ne se passera pas comme ça ! J’lave mon beurre, c’est vrai, et cela prouve que je suis une cuisinière propre, mais du moment que je suis méconnue, j’vas rendre mon tablier à Madame. Et puis, j’vous conseille de tenir votre langue, mamzelle, sans quoi pas une domestique ne restera chez vous.

À ce moment, on perçut des cris avec des sanglots. Sidonie alla écouter pendant que Justine se taisait. Quant à Suzette, elle savait ce que signifiaient ces manifestations.

Sidonie reparut en se tenant les côtes. Elle riait de si bon cœur que Justine se dérida. Suzette trouvait que ce fou rire était malséant.

Quand la domestique fut un peu calmée, elle dit en bégayant :

Mme Brabane pleure, parce que mamzelle Suzette a dit que ses enfants étaient laids.

— Non, c’est vrai ? s’exclama la cuisinière.

— Oui, répartit dignement Suzette.

— Jamais, je n’ai vu vot’pareille !

— Je n’aime pas le mensonge, poursuivit gravement la fillette et j’ai pris la résolution de toujours dire la vérité.