Page:Fiel - Trop belle, 1926.djvu/144

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soit bien pressante, mademoiselle, pour que j’insiste pour vous prier de venir dans notre pitoyable intérieur.

— Vous ne savez pas dans quelle intention votre mari me demande ?

— Il m’a recommandé de ne pas vous le dire. Il tient à vous l’exprimer lui-même. Vous viendrez, mademoiselle ; oh ! venez.

— Mais certainement.

Le visage de la jeune femme changea instantanément et devint lumineux de gratitude.

Un rendez-vous fut pris pour le lendemain. L’artiste s’appelait Vidal, et Sylviane connaissait de ses œuvres qui présentaient une certaine analogie avec les siennes. Auparavant, elle alla se renseigner chez son professeur qui lui dit le plus grand bien des Vidal. Il le savait pauvre. On s’occupait parfois de lui, mais n’ayant pas sous les yeux le spectacle constant de sa misère, on ne se rendait pas un compte exact de ses besoins.

L’artiste, d’ailleurs, possédait une fierté qui limitait ses plaintes.

Sylviane se rendit donc chez les malheureux, munie de nombreux paquets. Ils habitaient le cinquième étage. À la porte indiquée, elle sonna.

Madame Vidal vint ouvrir :

— Soyez la bienvenue, mademoiselle, mon mari vous attend.

Sylviane entra et son émotion fut intense en constatant la pauvreté du logis.

Son cœur fut douloureusement serré par les figures hâves des enfants qui la regardaient curieusement. Il faisait à peine chaud dans la pièce et Sylviane fut honteuse de la fourrure qui l’entourait, cadeau princier de Luc.

Elle tendit ses paquets à la jeune femme et dit, en ayant l’air de s’excuser :

— Les enfants aiment les gâteries.

— Merci, murmura simplement la mère, en saisissant les cartons et en comprenant que chacun aurait sa part et se restaurerait durant plusieurs jours.