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respect qu’il témoignoit pour sa personne, et par l’extrême attention qu’il prêtoit à ses leçons. Il savoit par cœur, il répétoit sans cesse ses phrases favorites ; il soutenoit ses principes religieux avec un zèle extraordinaire dans un si jeune homme, et bien propre à lui concilier les bonnes graces de ce digne précepteur.

Tom Jones, au contraire, ne donnoit à son maître aucune marque de respect. Souvent il passoit à côté de lui sans le saluer, sans lui ôter son chapeau. Il ne se soucioit pas plus de ses préceptes que de ses exemples. Inconsidéré, étourdi, léger dans ses propos comme dans sa conduite, il se permettoit fréquemment les plaisanteries les plus libres et les plus indécentes, sur la gravité pédantesque de son camarade.

Les mêmes motifs portoient M. Square à préférer Blifil. Tom Jones écoutoit les savants discours du philosophe, avec autant d’indifférence que ceux du théologien. Il osa un jour se moquer de la règle de la justice, et dit une autre fois qu’il ne connoissoit point de règle qui pût former un homme tel que son père. (M. Allworthy l’autorisoit à l’appeler ainsi.)

À l’âge de seize ans, Blifil savoit plaire à la fois aux deux rivaux. Avec l’un, il étoit tout à la religion ; avec l’autre, tout à la vertu. Les trouvoit-il ensemble ? il gardoit un profond silence que