Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 1.djvu/196

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étoit difficile de persuader qu’elle ne cherchât point à y réussir.

Ce qui confirmoit encore Thwackum dans cette idée, c’est qu’elle l’avoit adroitement engagé plus d’une fois à fouetter Tom, en l’absence de M. Allworthy, qui n’aimoit pas ce genre de punition, et que jamais elle ne lui avoit fait pareille recommandation, à l’égard du jeune Blifil. Square s’étoit aussi laissé prendre à ce piége. Au reste, quoique mistress Blifil eût pour son fils une haine véritable (sentiment qui n’est pas sans exemple, quelque monstrueux qu’il paroisse), on remarquoit à travers sa complaisance pour M. Allworthy, un vif mécontentement des bontés dont il combloit l’enfant trouvé. Elle s’en plaignoit souvent hors de sa présence, elle l’en blâmoit devant Thwackum et Square, et se permettoit même de lui reprocher en face sa foiblesse, à la plus légère contestation qui s’élevoit entre eux.

Mais lorsque Tom, en grandissant, commença à donner des marques de ce caractère sensible et généreux qui plaît tant aux femmes, l’éloignement que mistress Blifil avoit montré pour lui dans son enfance, diminua par degrés. Elle en vint au point de le préférer si ouvertement à son propre fils, qu’il fut impossible de se méprendre davantage sur ses sentiments. Elle le