Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 1.djvu/263

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pu frapper long-temps dessus, sans lui faire beaucoup de mal.

Molly, indépendamment de sa fâcheuse situation, présentoit aux coups de son adversaire des formes toutes différentes ; et cette circonstance auroit peut-être inspiré à la Brown l’envie de lui porter une perfide atteinte, si l’arrivée imprévue de Tom Jones, n’eût mis fin à ce combat sanglant.

Elle fut l’effet d’un heureux hasard. Square, après le service divin, étoit monté à cheval avec Blifil et Jones, pour prendre l’air. Au bout d’environ un quart de mille, il proposa à ses élèves, non sans dessein, mais par un motif que nous expliquerons à notre premier moment de loisir, de changer le but de leur promenade. Ils y consentirent, ce qui les obligea de repasser devant le cimetière.

À la vue d’un nombreux attroupement, et de deux femmes dans l’attitude où nous avons laissé Molly et la Brown, M. Blifil, qui étoit en avant, s’arrêta pour s’informer du sujet de la bagarre.

« Ma fine, monsieur, lui répondit un paysan en se grattant la tête, je n’en sais rien ; mais on dit, sauf votre respect, qu’il y a eu une batterie entre la femme Brown et Molly Seagrim.

— Que dites-vous ? » s’écrie Tom ; et reconnoissant sa chère Molly, malgré le désordre de ses traits et de ses vêtements, sans attendre de