Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 1.djvu/279

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

obligé de s’en retourner à pied ; il marcha si vite, qu’il fit plus de trois milles, en une demi-heure.

Près de la grille du château, il rencontra Molly, qu’un constable, avec sa troupe, menoit à cette maison, où les gens du peuple reçoivent une salutaire leçon de déférence et de respect pour leurs supérieurs, en apprenant à connoître l’énorme différence établie par la fortune entre les coupables que la justice punit, et ceux qu’elle épargne. Si le séjour de Bridewell ne leur sert de rien à cet égard, nous doutons fort qu’il leur procure d’autre instruction utile, ou qu’il les amende beaucoup.

Un jurisconsulte trouvera peut-être que M. Allworthy excéda, dans cette circonstance, les bornes de son autorité. Et en effet, le défaut d’information légale pouvoit rendre sa conduite un peu irrégulière. Cependant, la pureté de son intention doit l’excuser au tribunal de la conscience. Combien d’actes arbitraires commis tous les jours par des magistrats, qui n’ont pas la même excuse que lui.

Tom, instruit par le constable de la triste vérité, qu’il n’avoit que trop bien devinée, courut à Molly, la pressa contre son cœur en présence de tout le monde, et jura de tuer le premier qui oseroit l’arracher de ses bras. Il l’engagea ensuite à se calmer, à sécher ses larmes, il lui promit