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bruyante. Les bonnes femmes maudissent Black Georges de tout leur cœur, et plus d’une croit déjà voir le monstre au pied fourchu prêt à fondre sur le théâtre, pour se saisir de sa proie.

Le parterre se partage, comme de coutume. Ceux qui ne font cas que des sentiments héroïques et des caractères parfaits, nous blâment d’avoir exposé sur la scène une pareille friponnerie, sans en corriger l’effet par le châtiment du coupable. Les amis de l’auteur s’écrient en vain : « Oui, messieurs, Black Georges est un fripon ; mais ce caractère est dans la nature. » Les jeunes critiques du siècle, les apprentis-marchands, les clercs de procureur, les élèves des écoles de droit et de médecine, répondent que c’est une nature basse et digne des sifflets.

Les loges gardent leur réserve ordinaire. Le spectacle n’est pas, en général, ce qui les occupe. Parmi le petit nombre de spectateurs dont il fixe l’attention, les uns traitent hautement Black Georges de coquin ; les autres se taisent, et attendent l’avis des connoisseurs pour en avoir un.

Quant à nous, qui voyons clairement ce qui se passe derrière la toile du grand théâtre de la nature (et tout auteur privé du même avantage, doit se borner à composer des dictionnaires, ou des recueils d’anecdotes), nous condamnons l’action de Black Georges, sans avoir pour sa per-