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Georges Villiers[1], rapportée par Clarendon : anecdote peu digne d’entrer dans un ouvrage aussi grave que l’histoire de la rébellion, et qui figureroit beaucoup mieux, à côté de celle du spectre de mistress Veal, dont parle le docteur Drelincourt[2], au commencement de son discours sur la mort.

À dire vrai, l’historien qui se borne au simple récit des faits, et qui en écarte les circonstances même les mieux attestées, quand il les juge fausses, tombera quelquefois dans le merveilleux, mais non dans l’incroyable. Il excitera souvent l’étonnement du lecteur, mais il ne révoltera jamais sa raison. Si, au contraire, il se jette dans la fiction, il perdra son noble caractère, et ne sera plus qu’un romancier.

  1. Voyez dans l’histoire de Clarendon, édition de 1704, tome Ier, page 56 et suivantes, le récit de l’apparition de Georges de Villiers, père du duc de Buckingham, à un officier de la maison de Charles Ier. Cette anecdote a quelque ressemblance avec celle du maréchal ferrant de Salon, rapportée dans les Mémoires du duc de Saint-Simon.Trad.
  2. Fielding commet ici une singulière méprise. Le docteur Drelincourt, ministre de l’église réformée, auteur de beaucoup de savants ouvrages de controverse et de piété, naquit à Sedan vers la fin du XVIe siècle, et mourut en 1669. C’est à la tête d’une traduction angloise de son livre des Consolations contre les frayeurs de la mort, imprimé à Londres en 1741, que se trouve le récit de l’Apparition d’une mistress Veal à une mistress Bargrave, à Canterbury, le lendemain de sa mort, arrivée le 7 septembre 1705. Ce récit n’a rien de piquant. Le traducteur, Marius d’Assigny, en détruit lui-même le merveilleux, en mettant dans la bouche du prétendu spectre, l’éloge du livre du docteur Drelincourt, dont il recommande, à plusieurs reprises, la lecture.Trad.