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me permit de rentrer dans mes foyers. Je réglai à l’amiable mes affaires d’intérêt avec mon frère. Je lui abandonnai la totalité de mon bien, moyennant une somme de vingt mille livres sterling, et une rente viagère. Sa conduite dans cette dernière circonstance, comme dans les précédentes, fut celle d’un homme dur et intéressé. Je ne pouvois compter sur son amitié ; il ne faisoit nul cas de la mienne. Je lui dis adieu, et à toutes mes connoissances ; et là finit, pour ainsi dire, l’histoire de ma vie. »

« Est-il possible, monsieur, dit Jones, que vous ayez eu le courage de rester ici depuis ce temps ?

— Oh non ! monsieur, répondit le vieillard, j’ai fait de grands voyages. Il y a peu de contrées de l’Europe que je n’aie parcourues.

— Après la peine que vous avez déjà prise, je n’ose, ajouta Jones, vous importuner par de nouvelles questions. Je serois pourtant fort curieux de connoître les excellentes observations qu’un homme de votre mérite n’a pu manquer de faire, dans un si long cours de voyages.

— Je tâcherai, répondit le vieillard, de vous satisfaire aussi sur ce point. »

Jones, par discrétion, voulut en vain l’engager à prendre un peu de repos. Le solitaire, pour répondre à son impatience et à celle de Partridge,