Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 2.djvu/413

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apprendront à leurs dépens qu’il y a un diable. Il leur fera payer les vieux écots qu’ils me doivent. J’ai logé pendant six mois un de ces messieurs. Il dépensoit à peine un schelling par jour, et n’eut pas honte de me prendre ma meilleure chambre. Il permit même à ses gens de faire cuire leurs choux au feu de ma cuisine, parce que je refusai de leur préparer à dîner, un jour de dimanche. Tout bon chrétien doit souhaiter qu’il y ait un diable, pour la punition de pareils misérables.

— Halte-là ! monsieur l’aubergiste, dit le sergent, n’insultez pas l’uniforme. Je ne le souffrirai point.

— Au diable l’uniforme. Il m’a coûté assez cher, pour qu’il me soit permis d’en médire.

— Je vous prends à témoin, messieurs, il maudit le roi, et c’est un crime de haute trahison.

— Moi ! je maudis le roi, scélérat que vous êtes ?

— Oui, vous l’avez maudit. Vous avez maudit l’uniforme, et c’est maudire le roi ; il n’y a point de différence. Quiconque maudit l’uniforme, maudiroit le roi s’il l’osoit : ainsi c’est tout un.

— Pardonnez-moi, monsieur le sergent, dit Partridge, votre conséquence est un non sequitur[1].

  1. Ce mot, que le sergent prit malheureusement pour une insulte,