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Hambrook[1]. Honora y reçut la désagréable commission de s’informer du chemin que M. Jones avoit pris. Le guide auroit pu l’indiquer mieux que personne. Nous ignorons pourquoi Sophie ne s’adressa point à lui.

Sur les renseignements que donna l’hôte, Sophie demanda des chevaux, et s’en procura avec peine d’assez mauvais qui la menèrent à l’auberge où Jones avoit été retenu plusieurs jours, moins par la gravité de sa blessure, que par l’ignorance de son chirurgien.

Ici Honora, chargée d’une nouvelle enquête, n’eut pas plus tôt dépeint à l’hôtesse la personne de M. Jones, que la fine mouche commença, comme on dit, à éventer la mèche. Lorsque Sophie entra, sans répondre à la suivante : « Bonté divine ! dit-elle s’adressant à la maîtresse, qui l’auroit cru ? Sur ma parole, voilà le plus aimable couple qu’il soit possible de voir. Ma foi, mademoiselle, je ne m’étonne pas que le jeune écuyer coure ainsi après vous. Il m’a dit que vous étiez la plus belle dame du monde, et assurément il ne m’a pas trompée. Le pauvre jeune homme, Dieu ait pitié de lui ! je l’ai bien plaint, oui, je l’ai plaint de toute mon ame, quand je l’ai vu embrasser tendrement son oreiller, et l’appeler sa chère Sophie. J’ai fait tout ce que j’ai pu pour

  1. C’étoit le village où Jones avoit rencontré le quaker.