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que si vous ne consentez pas à voir le lord cette après-midi, j’irai moi-même demain matin vous remettre entre les mains de votre père ; et qu’à dater de ce jour, je ne me mêlerai plus de rien de ce qui vous regarde, et ne vous reverrai de ma vie. »

À ces mots que la tante prononça avec l’accent de la colère et le ton de l’autorité, Sophie resta muette ; puis un moment après fondant en larmes : « Faites de moi, madame, tout ce qu’il vous plaira, s’écria-t-elle, je suis la plus infortunée créature qu’il y ait sur la terre. Si ma chère tante m’abandonne, où trouverai-je un appui ?

— Ma chère nièce, vous trouverez un excellent appui dans le lord Fellamar, un appui que votre passion pour ce misérable Jones peut seule vous faire refuser.

— En vérité, madame, vous ne me rendez pas justice. Si j’avois eu pour lui les sentiments que vous me supposez, pouvez-vous croire que sa lettre à lady Bellaston ne les eût pas effacés de mon cœur ? Voulez-vous que je m’engage par un serment solennel à ne jamais le revoir ? j’y consens volontiers.

— Mais, mon enfant, ma chère enfant, soyez raisonnable. Pouvez-vous me faire une seule objection contre le lord ?