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province ! La province est la perte de toutes les jeunes personnes. Elles s’y remplissent la tête de mille idées d’amour romanesque, de mille extravagances dont un hiver entier passé à Londres en bonne compagnie, peut à peine les guérir.

— Votre cousine, milady, est d’un trop grand prix, pour ne pas chercher à la sauver. Il faut prévenir sa ruine.

— Hélas ! milord, comment l’empêcher ? Sa famille a déjà fait tout ce qui étoit en son pouvoir ; mais la malheureuse est, je crois, ensorcelée. Elle veut absolument se perdre. Enfin, pour ne vous rien cacher, je crains tous les jours d’apprendre qu’elle s’est enfuie avec son amant.

— Ce que vous me dites-là, milady, m’affecte d’une manière sensible, et au lieu de diminuer l’amour que m’a inspiré votre cousine, ne fait qu’exciter ma compassion pour elle. Il faut, je le répète, trouver un moyen de sauver cet inestimable trésor. Avez-vous essayé sur elle le langage de la raison ? »

Lady Bellaston fit semblant de rire. « Mon cher lord, dit-elle, nous connaissez-vous assez peu, pour croire qu’il soit possible de combattre avec les armes de la raison l’inclination d’une jeune fille ? Autant vaudroit se donner de la tête contre un mur ; le temps, milord, le temps est le seul remède à la folie de ma cousine ; mais c’est un