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26o LES PRiniTIFS FLAMANDS

A qui faut-il attribuer le beau tableau : Scènes de la Vie de la Vierge, placé dans le déambulatoire de la cathédrale de Tournai (Fig. CLXXXXIV)? M. Friedlânder le déclare des dernières années de Blondeel; M. Hymans y voit une oeuvre de Pierre Coecke. A première vue, la Madone rappelle celle du tableau de Saint-Sauveur signé par Blondeel en 1545; même type, mêmes vêtements avec draperie en cordes. L'arcade où trône la Vierge s'élève sur un arc triomphal à travers lequel on aperçoit un paysage romantique , — et cette disposition est semblable à celle du même tableau de Saint-Sauveur. Mais l'exécution est très supérieure et le décor affecte un carac- tère plus classique. Sonl-ce là des raisons suffisantes pour attribuer l'œuvre à Pierre Coecke? Nous ne le croyons pas. Nous avions un instant pensé à Corneille van Coninxloo à cause des délicieux angelots peints à droite et à gauche de la Madone, mais, tout compte fait, nous pensons que, jusqu'à plus ample informé, il faut voir dans ces Scènes de la Vie de la Vierge l'une des meilleures peintures de Blondeel.


Peut-être trouvera-t-on que nous avons parlé avec quelque excès du dessina- teur de la Cheminée du Franc. Nous ne voulons point dissimuler l'intérêt que nous portons à plusieurs d'entre ces artistes multiformes des débuts de XVI""' siècle et l'on peut tenir Lancelotus pour l'un des plus curieux et des plus remarquablement doués. Le puissant artiste dessina de nombreux cartons de tapisseries destinées à l'hôtel de ville de Bruges (i523), à la salle échevinale du Franc (1528 et 1544), à la demeure de messire Louis de Vallée, dit Passay, commandeur des Flandres à Slype (1534). 11 dessina également des cartons de vitraux pour la salle des échevins à l'Hôtel de Ville. Le maître alla jusqu'à exécuter des patrons de chandeliers pour l'église du Saint-Sang et le modèle d'un « tref » en métal pour l'église de Saint-Gilles. Il col- labora à des décorations de fêtes, comme nous l'avons vu plus haut. En 1627 il accepta de vernir un tableau qui se trouvait à l'hôtel de ville et d'en décorer le cadre ; en 1528 il expertisa un Jugement dernier qui se trouvait dans la salle échevinale du Franc. Sans doute approuvait-il le mol de Léonard de Vinci : « Le peintre doit-être universel ! Essere universale. »

La biographie de Lancelol Blondeel nous apprend que nous ne pouvons sauver l'architecture et toutes les branches du décor de leur actuel marasme qu'en rendant les monuments aux artistes, qu'en replaçant les créateurs à la tête des industries artistiques. Que le bon Lancelol Blondeel nous pardonne d'avoir tant parlé d'art