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SOMMAIRE

Cure d’air : Henry Roujon.
La Vie de Paris : Le sommeil du Palais : Le Greffier.
La guerre russo-japonaise : La grande bataille : De Beyre. — Marc Landry.
Mgr Geay à Rome : André Nède.
Mort du sultan Mourad : A. Fitz-Maurice.
La crise marseillaise.
Enquête sur l’Université et la Politique : Jules Huret.
Souvenirs sur Fantin-Latour : A. Alexandre.
Journaux et Revues : André Beaunier.
L’ambulance franco-russe : Ulysse.
Dans le Velay : Georges Bourdon.
Trente Ans de théâtre : Adrien Bernheim.

Cure d’air

J’habite en ce moment un coin de l’Oberland où les neiges éternelles sont éclairées à l’électricité. Il s’est livré là, en-ces dernières années, une lutte inégale entre les chamois et les ingénieurs les chamois ont été vaincus. L’Alpe s’est couverte’d’un réseau de rails et maintenant les locomotives voisinent avec les moraines. Une véritable ville d’hôtels meublés a surgi dans le velours des pâturages. Tout un peuple de touristes, échappé des romans de Cherbuliez, vient chercher là un peu de santé et d’oubli. On y rencontre des Russes inquiétants, de majestueux docteurs d’universités allemandes avec leurs frauleins, des alpinistes anglo-saxons sanguins et antipathiques, et, plus rares, quelques Fran, çais en bordée. Comme toujours, nos compatriotes se font remarquer par leur bonne humeur expansive et parle mécontentement qu’ils exhalent contre les hommes et les choses de leur pays. Suivant la célèbre définition.que donnait à Henri Heine une servante d’auberge, on. reconnaît aussi les Français à ceci qu’ils ont quelque chose de rouge" à là boutonnière et qu’ils exigent du mouton. » a Est-ce chauvinisme je les trouve néanmoins plus gentils que les autres peuples et leurs femmes me semblent plus belles. Malgréles efforts des ingénieurs, ce lieu — « .gard4’iine grâce farouche qui dispose à u p’opti misme’indulgent. Ici, la vie intellectuelle s’interrompt heureusement l’animalité s’épanouit en vous. Quand il pleut, on apprend par cœur la liste des étrangers, ou encore on regarde des caricatures berlinoises d’une méchanceté candide. Pour ma part, je fais mes délices d’un Guide illustré de la région, qui abonde en pensées innocentes. J’y ai noté cette maxime, qui peut, paraître d’une rédaction périssable, mais dont il sied d’apprécier la justesse « Vraiment, c’est une jouissance très délicate de se trouver seul devant la majestueuse nature ! » Cette délicate jouissance, nous ne sommes guère plus de deux mille à la savourer, dans une solitude de quelques hectares.

Lire ? — On s’en garderait comme d’une inconvenance. La bibliothèque de l’hôtel est pourtant richement pourvue, et dans un large esprit d’éclectisme international. On y trouve plusieurs Bibles et d’innombrables romans anglais. Notre génie y est représenté par l’œuvre entier de Paul de Kock. Cette gloire bellevilloise qui fut chère au Pape Grégoire XVI, s’est attardée là, devant la Jungfrau. Il ne tiendrait qu’à moi de relire Monsieur Dupont et la Prairie des coquelicots. Je suis tenté, de le faire, et je n’ose ; je craindrais d’y prendre quelque plaisir. Ces joyeux récits m’ont laissé une impression de gaieté funèbre et d’ordurière stupidité. Je tiens à garder cette opinion. J’ai pourtant failli la perdre, par perversité pure et par esprit de contradiction.

Nous vivions là, paisibles, échangeant des idées de table d’hôte, et nous racontant des histoires d’ascensions ingénument mensongères. Une dame a passé parmi nous, qui nous a troublés. Cette dame, probablement slave, parlait quatre ou cinq langues et s’entendait à toutes les littératures. C’était une personne charmante et terrible. Ne demandez pas si elle était divorcée, cela tombe sous le sens. Elle l’était plusieurs fois, comme il convient, et ses veufs erraient dans les deux mondes. Elle abondait en propos sévères-contre les conventions sociales et en jugements hardis sur les arts. Bien qu’elle me méprisât, en tant que mandarin, elle daignait, entre deux parties de tennis, me communiquer ses certitudes. Au bout d’un demi-heure de causerie, j’eus le regret de constater qu’elle savait Nietzsche par cœur. Ainsi du reste. En poésie, en peinture, en musique, en sociologie et en hygiène, elle n’avait que des opinions d’après-demain. Dans sa petite enfance à l’âge où les autres jouent àia poupée, elle était de tous les Bayreuth ; depuis, elle a trouvé dans Parafai de la fadeur et cette découverte l’a guérie du wagnérisme. Raphaël lui • donne, des— nausées ; elle est « trecentiste », et Enguerrand Charonton lui sufîît à peine. Le gros génie de Victor Hugo ne lui inspire que de la pitié. J’ai cru devoir lui prêter le Figaro. La consultation des-auteurs dramatiques, provoquée par notre ami Serge Basset, a suscité en elle des sentiments divers et violents. Alors, je ne sais pourquoi, j’ai senti que l’âme du bon. Sarcey. m’envahissait. En "face d’une adversaire si. informée, une rage m’a pris d’opinions moyennes et de ; vérités faciles. 11 est-amusant.de sèn^r’qu’on passe pour un iolbëcile aux yeux de certaines personnes. Je me suis rué sous ses dédains. J’ai commencé par l’exaspérer en osant soutenir que, malgré tout le mérite des Corbeaux et de la Parisienne, la scène française n’avait pas attendu la venue de Becque pour exister. Je lui ai cyniquement avoué mon admiration pour le théâtre de Dumas fils elle a souri. J’ai parlé d’Émile Augier sans dégoût elle a soupiré. Poussé à bout, je suis allé jusqu’à lui marquer quelque estime pour Scribe elle a râlé. J’ai épuisé la joie de son mépris.

La peur de ne point paraître assez avancé, qui fait en politique des criminels, sévit plus encore en littérature. Cette dame exotique s’appelle légion. Nous trouvions que nous n’étions pas assez, naguère, à vouloir en art de la rareté, à chercher l’étrange, à mettre de l’avenir dans le présent, à cueillir les fruits verts du passé. Nous avons fait école de zélateurs. Aujourd’hui, ils sont trop. Il y a surabondance ae gens intelligents, de ceux-là surtout qui le sont à l’excès. Les demoiselles à marier chantent du Verlaine, et voici que bientôt Ibsen ne suffira plus aux grands cercles. Les gens du monde n’ont plus assez de préjugés. On leur voyait autrefois des idées étroites qui leur convenaient à merveille. II me semble que je les aime moins, depuis qu’ils pensent et qu’ils ont des jouissances audacieuses.

Au temps des batailles romantiques, l’état social comportait un système de castes qu’on serait tenté de regretter. D’un côté se groupaient les servants de l’art en secte insolente, suspecte et parquée de l’autre, l’élite des honnêtes personnes que l’idéal ne tourmentait pas. On se traitait réciproquement de bourgeois et de bohèmes ; on se haïssait affectueusement. Ces deux humanités tenaient à se distinguer, l’une de l’autre jusque par le costume et la coiffure. C’était un drapeau que le gilet rouge de Gautier. Les bousingots du parterre interpellaient les capitalistes de l’orchestre en ces termes, où l’on aurait tort de voir de— la colère : « A la guillotine, les genoux » Cela voulait dire alors, simplement, qu’on ne communiait pas sous les mêmes espèces dans la religion de la beauté. Banville racontait délicieusement qu’à la première représentation de l’opéra La Esméralda, tandis que le chœur chantait ces vers :

Voici les bourgeois stupides
Qui se hâtent sur les ponts,
un monsieur, congestionné, avait surgi dé sa stalle en s’écriant « Pourquoi stupides ? » On l’avait, contraint de se rasseoir, sans même daigner lui répondre. Il était établi que tous les bourgeois étaient stupides. Cela les empêchait de l’être trop.

De part et d’autre on était chez soi. Quand un jeune homme annonçait des dispositions pour la poésie, la musique 6u~ la peinture, — il commençait par encourir la malédiction paternelle et par être expulsé de la maison. Quelques mois ou quelques années de misère vaillante, en éprouvant sa vocation, ou bien le ramenaient penaud au comptoir natal, ou bien le trempaient pour l’héroïsme. La montée vers l’idéal se faisait su’r les genoux et les mains déchirées. On y gagnait d’avoir moins de professionnels de l’art et plus d’artistes vrais.’ Aujourd’hui nos ateliers pullulent d’apprentis inutiles ; des industriels envoient leurs filles au Conservatoire, et des pères établissent leurs garçons poètes lyriques. C’est trop de fleurs.

En ce jadis, hélas ! disparu, il y avait un beau pour la classe moyenne, un sublime raisonnable, usuel, portatif, facile à suivre, celui de Rosa Bonheur, de Casimir Delavigne et de Donizetti. Il y avait des genres à l’usage des classes dirigeantes la peinture champêtre, la romance, l’opéra Renaissance, la comédie sentimentale en vers. Il y avait le Théâtre de Madame et le Concert Musârd— Chacun restait dans son monde et s’enthousiasmait selon ses forces. C’en est fait de ces sages hiérarchies. Désormais l’intellectualisme coule à pleins bords. Il y aurait sottise et orgueil à s’en affliger.

Mais peut-être vais-je relire, pour oublier ma moderne et délicieuse dame slave, deux ou trois romans de Paul de Kock. L’intelligence a son hygiène et il n’est pas mauvais, de temps à autre, de faire une halte dans la simplicité.

Henry Roujon. 

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LA VIE DE PARIS


Le sommeil du Palais


Les vacances judiciaires battent leur plein. Cependant, le Figaro chaque jour publie quelque petite nouvelle du Palais. D’où vient cette contradiction ? C’est que la justice ne sommeille jamais que d’un œil. Durant les vacations, alors que le Palais semble aux touristes défilant dans les couloirs lepalais de la Belle au bois dormant, il y a, derrière des portes, des magistrats qui travaillent. Certes, là demi-solitude du grand monument, le souvenir des collègues dispersés.à la campagne ne leur donnent pas, comme on dit à l’atelier, le « caractère très ouvrier » mais, enfin, ils viennent, et leur présence donne au justiciable l’impression que la grande machine à juger fonctionne, d’un fonctionnementà basse pression. C’est ainsi qu’en ces jours d’août on peut voir s’ouvrirla Chambre des vacations (affaires urgentes pensions alimentaires, accidents, séparations de biens, etc.), l’audiencedes référés, celle des conciliations d’accidents du travail et de divorcés, sans parler des séances de Chambre du Conseil, des mises "en correction, des requêtes, etc., etc. C’est pour présider ou siéger à ces audiences intimes que chaque jour, mélancoliques et résignés, des inagis* tràts gravissent discrètement les escaliers déserts et circulent par les couloirs abandonnés. Nommons ces victimes, ce sont, pour ce premier mois de vacations M. le président Sureau, MM. Masse, Clément et Chappeau, juges MM. Hibon et Vigneron d’Heucqueville, juges suppléants. De la grande compagnie des magistrats civils, voilà tous ceux qui restent. Le reste de la troupe est aux champs. La justice répressive a laissé des sentinelles contre « l’Armée du ; Mal », plus nombreuseet plus agissante ; cette garde demeure et rend des jugements. Une quarantaine d’inculpés, quotidiennement frappés par elle, pourrait témoigner de sa permanente vigueur. A la simple police, les justiciables, deux fois par semaine ; trouvent un juge qui les expédie : « enbloc ». A la Cour d’assises, M. le président Dubreuil et ses deux assesseurs, MM. les conseillers Drouard et Couinaud, se tiennent tous les jours à leur disposition. Quotidiennement aussi, les présidents des 9e et ne Chambres, MM. Toutain et Salvador, assistés, le premier, de MM. Coularouet Maufroy, le second, de MM. Schlumberger et Lantz, font, de’ midi à quatre heures, une large distribution de peines, d’amendes et d’emprisonnement.La Chambre des appels correctionnels, que préside M. Aubry, assisté de MM. René Waldeck-Rousseau, Baffray, Pompeï, Roulleau et Plaisant, tient deux audiences par semaine. La Chambre des mises en accusation se contente d’une seule audience, ainsi, du reste, que la Chambre criminelle de la Cour de Cassation, présidée par M. Bard, et oùM— l’avocat général Lombard occupe le siège du —ministère public. Au Parquet général,’M.. Courtin, supplée M. Bulot, qui est au bord de la mer. Autour de lui se groupe un escadron de substituts :.MM, Guillemin, Pezous, Rome Leloir, etc. Au Parquet du Tribunal, M. Paul Boulloche remplace le procureur de la République, M. Vic-. tor Fabre, qui passe ses vacances à Aix, son pays natal. A ses côtés se tiennent MM. les substituts Wattinne, Castaing, , Piédelièvre, ; Peignot, Guépet, Fieffé, Bouquet, Lefresne, Magnien et Bloch-Laroque. Cependant, les cabinets d’instruction de. MM. Drapier, Hausset, Larcher, André, ; Bouis’son, Worms, Cail, Roty, Berr et Barat. sont largement ouverts aux inculpés.. Le Palais, on le voit, ne dort pas autant. qu’il en a l’air. Ce n’est qu’un assoupissement léger. Un avocat dont les plaidoiries ont le talent c’est leur seul de produire sur les juges l’effet de Petit-Jean sur Perrin-Dandin, résu*. mait.ainsi cette situation C’est ici, maintenant, le sommeil du Palais. Mais, en octobre, ce sera le Palais du sommeil." Le Greffier. Échos A-ii.~J’~3 La Température La baisse barométrique continue ;  ; la pression devient inférieure à 760mm sur les îles Britanniques, tandis qu’elle dépasse 765mm dans le centre du continent. Des orages ont éclaté sur nos régions de l’Ouest ; à Paris, la journée d’hier a été à fréquentes averses il a plu également à Rochefort, à Lorient et à Cherbourg sur nos côtes, la mer est belle ou peu agitée. Hier matin, à Paris, vers sept heures, le thermomètre marquait 160 au-dessus, et 2£° à deux heures de l’après-midi on notait le matin 19° à Boulogne, 21° à Perpignan. En France, le temps devient très chaud ; les averses vont continuer dans l’Ouest et s’étendre aux autres régions. Le baromètre, à y6o""o dans la matinée marquait 758mm dans la soirée. Dieppe (à 2 h. 43 de Paris). Temps beau. Mer belle. Thermomètre igo. Du New York Herald A New-York Temps brillant. Température minima, —}— 60 ; maxima, + 210. Vent faible du nord. Baromètre en hausse. A Berlin Beau temps. Température ~f— 20°. A Londres Nuageux.Température minima -4— 120 maxima, —4— 280. Vent faible du sudouest. Baromètre en baisse. LE PONTIFICAT DE M. COMBES ^xll est hors de doute que le départ de < Mgr Geay pour Rome a dû causer à M. Combes une déception très vive. Un instant, le président du Conseil a pu croire qu’il créait un schisme et constituait une Eglise gallicane dont il seraitle chef, C’est ainsi que l’on prend le goût des grandeurs ! M. Combes s’est figuré, que le clergé français une partie, au moins, du clergé français céderait à de belles promesses d’avancement et viendrait à lui comme un dispensateur des promotions avantageuses. L’idée qu’il deviendrait le grand chef d’un épiscopat combiste n’était pas pour lui déplaire. Il est aujourd’hui détrompé. Depuis quelques semaines, il va de déceptions en déceptions. Il a dû restreindre, au jour le jour, ses espérances il les avait réduites, finalement, à l’évêque de Laval c’était encore quelque chose. Les évèques, avec une saisissante unanimité, affirmaient leur soumission spirituelle au Saint-Siège. L’évêque de Laval, à lui tout seul, ne suffisait pas au projet de schisme. Toutefois, il était encore une assez gentille petite victoire contre le Vatican. M. Combes espérait taquiner le Souverain Pontife au moyen de Mgr Geay. Il lui faut renoncer à ces —intentions. Dès que l’évêque de Laval fut à Rome, il remit entre les mains du Pape cette démission qu’il se proposait de donner il y a longtemps déjà et à laquelle.M. Combes s’opposait énergiquement. Bref, Mgr Geay eutà choisir, si l’on ose parler ainsi, entre les faveurs de M. Combes et l’autorité spirituelle du Pape il a pris le parti que sa conscience de ; prélat lui indiquait. Et, à présent, M. Combes s’aperçoit de la puissance formidable que représente le Saint-Siège. Puissance toute spirituelle, dépourvue des moyens habituels que les gouvernements emploient à l’égard de leurs fônctionnaires, forte seulement de sa valeur propre, de son prestige et de cette suprématie qu’exerce sur les âmes le caractère divin dont elle s’inspire, elle bat en brèche un pouvoir temporel orgueilleux des sanctions dont il dispose, ’.• Cet incident édifiera-t-il M. Combes ? l’avertira-t-il de l’erreur.qu’il commet lorsqu’il rêve de s’instaurer antipape des Gaules ? de’l’erreur plus néfaste encore qu’il commet en se figurant qu’il est facile de rompre avec Rome ? Dénoncer le Concordat, c’est bientôt dit. Mais, en dehors du pacte qui détermine les rapports de l’Etat français avec l’Eglise romaine, il y a des liens très solides qui unissent au chef de la chrétienté les consciences chrétiennes ces liens-là, M.Combes ne les saurait anéantir, même s’il dénonce le Concordat. A Travers Paris Est-ce que le banquet d’Auxerre, où M. Combes doit prononcer un considérable discours, sera très magnifique ? On n’en est pas bien sûr. L’Yonne, qui s’enorgueillit de son Pioupiou, semblait toute désignée aux promoteurs d’une manifestation très combiste. Et cependant, ça ne va pas tout seul. On comptait sur tant de convives que, d’abord, on se demandait où l’on pourrait bien les caser. Et puis, il sembla que deux mille cinq cents couvertssuffiraient. C’est encore un chiffre imposant ! Le restaurateur que l’on a chargé du soin de ces ripailles a reçu la commande de deux mille cinq cents portions. Il prit ses mesures, compta ses poulets, ses saumons, ses bouteilles de champagne, et tout le reste des bonnes choses. Et c’est alors qu’on s’aperçut que les adhésions ne venaient pas très vite. On avait orgueilleusement fixé une date assez proche pour la clôture solenpnelle des listes. Diable pas grand ’monde ! II fallut reculer cette date. Il fallut aller, à droite et à gauche, exciter les convives, les amateurs de saumon, de’poulet rôti, d’éloquence ministérielle. Recherches, démarches et tout ce qui s’ensuit. Et, même ainsi, l’entrain de l’Yonne donne à peine neuf cents convives. — Si vous connaissez des amateurs, désignez-les donc à ce restaurateur qui .c ommence —a être fort uïquietid.u,.plaçément de sa marchandise, ou bien à ce président du Conseil qui demande des auditeurs. _ Lorsqu’un ministre croit devoir se mettre en frais d’éloquence dans quelque réunion, —il est d’usage que le.texte, ou au moins un compte rendu complet de son discours, soit envoyé à T AgenceHavas, qui le communique aux journaux. ’Cette règle traditionnellasouffre depuis quelques mois une exception singulière, au préjudice– ou peut-être. au profit de M. Carnille-Pelîetan.Il n’est guère de dimanche où notre loquace.ministre de la marine n’aille faire un tour en.province et ne donne libre cours à sa verve. Mais Y Agence Havas se borne à enregistrer les déplacements et villégiatures de M. le ministre et n’offre— à ses abonnés aucun aperçu des belles choses qu’il n’a’ pas manqué de dire. Faut-il supposer que M. Camille Pelletan, trop modeste, n’attache aucune importance a ses propos et les juge indignes d’être soumis au public ? Il y a, paraît-il, une autre explication. On raconte que M. le présidentdu Conseil a été fort ennuyé des écarts de langage dont le chef suprême de notre flotte est coutumier. Un jour, on s’en souvient, entre le champagne et le café, M. Pelle. tan avait quasiment déclaré la guerre à l’Italie. Et c’était M. Combes qui était obligé de réparer tant bien que mal les gaffes de son ministre de la marine, en les mettant sur le compte de la « chaleur communicative des banquets ».. On prétend que c’est M. le président du Conseil qui est intervenu pour soustraire les discours de M. Pelletan à la publicité. Il trouve que c’est plus prudent. La renommée d’Holbein risqueraitelle d’être éclipsée ? Nous apprenons de New-York qu’une course d’endurance, à la nage, disputée par trente-cinq concurrents, a’été gagnée par un certain Charles Siegfried, qui a parcouru, en cinq heures quarante-cinq minutes, une distance de dix-neuf kilomètres —entre le pont de Brooklyn et l’île Coney, soit la moitié du parcours Douvres-Calais. Et ce valeureux Siegfried est plus étonnant encore que celui delà légende il n’a qu’une seule jambe à son service, et dans l’eau, aussi bien que sur terre, ce doit être plutôt gênant. La Fédération internationale pour l’observation du dimanche tiendra, au mois d’octobre prochain, son dixième Congrès à l’exposition de Saint-Louis. Elle se propose de donner à l’idée que depuis longtemps elle promulgue, une très grande expansion. Elle fait bien. Car —le repos du dimanche est nécessaire. Il le devient de plus en plus à mesure que s’impose davantage cette loi de la société contemporaine la division du* travail. La division du travail, indispensable à la production la meilleure et la plus abondante, assigne à chaque ouvrier une tâche restreinte et monotone qui développe son habileté manuelle et, en même temps, diminue sa vie mentale. Un jourpour.le rêve, chaque semaine, ce n’est pas trop. Il ne s’agit pas, en effet, du repos seulement. ; Il ne suffit pas que le corps ait son.-relâelie nécessawe ; —il faut encore que l’âme puisse se reconnaître au milieu des besognes qui lui sont assignées et que parfois elle soit libre de prendre son essor. C’est ce qu’ont très bien compris les promoteurs de ce mouvement. Une tradition très ancienne a choisi le dimanche pour la tranquillité des travailleurs. Nos grands esprits aimeraient peut-être mieux le lundi ? car nos grands esprits ont.de petites idées. Laïcisation de la musique. Une blanche affiche officielle, toute neuve, que l’on colle en ce moment sur les murs parisiens, porte un arrêté de M. de Selves, en date du’29 août, qui réglemente les conditions du « Concours ouvert par la Ville.de Paris entre tous les musiciens français pour la composition d’une’œuvre musicale de haut style et de grandes proportions (concours dont le Figaro a longuement parlé au mois de juillet dernier). Certain petit article de cet arrêté est révélateur de l’état d’âme ultra-laïque des autorités «  Sont exclues du concours les œuvres présentant un caractère liturgique. » Ainsi, si quelque futur Berlioz ou quelque nouveau Rousseau présentaient une Enfance du Christ ou une Messe solen. nelle, ces œuvres seraient.impitoyablement écartées.. Pourquoi ? Eh ! c’est que la musique liturgique doit être évidemment cléricale On ne saurait l’admettre aux lauriers officiels. Il faut laïciser la musique 1 Propos d’un flâneur. Ayez la fantaisie d’errer-dans les rues parisiennes, par un soir d’été, et vous y noterez une originale et-nouvelle victoire du « machinisme sur l’homme c’est simplement à propos de musique, mais le fait s’impose avec une vigueur surprenante. — Dans tout coin le plus désert du quartier le plus excentrique, vous entendrez les flons-flons puissants d’un orchestre complet. Ils viennent d’un petit café local, ou même d’un simple « bar ». Approchez c’est dans le fond de l’établissement et tout scintillant de verroteries, de cuivres et de lumières, un immensa instrument automatique, un « orchestre mécanique » plus ou moins perfectionné, qui joue tous les morceaux, jusqu’aux complications de Wagner. • Quant aux tout petits bars, il n’en est plus guère aujourd’hui qui ne possèdent au moins un phonographe, nasillant les airs "connus ; Cette singulière/vogues’est développée très-vite, en cette seule année. Les foules populaires, lasses d’aller jusqu’aux cafés des boulevards pour entendre les pseudotziganes, ont vôulu la musique chez elles, dans leur quartier, qu’on puisse écouter en voisins. • Les débitants avisés, ne pouvant— évidemment s’offrir le luxe d’une troupe de musiciens, débitent à leurs clients de la « musique mécanique ». Et ceux-ci, ravis, écoutent, boivent et payent.

T.

Les tribulations d’une barrière La petite cour dite des « objets perdus », à l’annexe de la préfecture de police, quai des Orfèvres, a présenté, l’autre semaine, une animation, extraordinaire. C’est là, en effet, que se trouve lei 4° bureau, qui délivre les permis de’ chasse. • L’affluence fut telle à un certain moment que pour empêcher l’envahissement, on dut établir un’important service d’ordre et placer des barrières, derrière lesquelles les intéressés se rangeaient, en.attendant leur tour. Les disciples de saint Hubert ne se doutaient certainement pas qu’ils s’appuyaient sur la lugubre clôture qui, le jour des exécutions capitales, entourait la guillotine, sur la place de la Roquette, et éloignait de la. funèbre. machine les spectateurs avides de fortes émotions. Tout de même, quelle déchéance pour une barrière qui a fait partie du décor des plus horribles tragédies 1 Aujourd’hui, mercredi, 31 août, laHôllande est en liesse. N’est-ce pas la fête de lareine Wilhelmine, souverained’Europe, sympathique entre toutes ? Lamaison Lucas Bols, du boulevard des*ttaliens, à Paris, a trouvé une façon ingénieuse et aimable de célébrer cette fête elle offre gracieusement, à titre de souvenir, à toutes les personnes qui visiteront son curieux magasin de dégustation une très originale glace à main. Voilà une occasion dont beaucoup de Parisiennes ne manquerontpas de profiter. Hors Paris L’ordredeSaint-Georges, dontlagrandcroix vient d’être conférée au vaillant Slcessel pour son admirable défense de Port-Arthur, est le plus estimé des ordres militaires de la Russie. Il a été créé en 1769 par l’impératrice Catherine II et ne se donne que pour des faits de guerre éclatants. Le général Stœssel en était donc bien digne, lui qui étonne le monde par l’inlassable ténacité dont il fait preuve derrière les remparts de Port-Arthur. Le ruban est noir.et orange. La croix, d’une ornementation très sobre, se porte à la boutonnière, en cravate ou en sautoir, suivant la classe qui est conférée. Détail particulier les navires peuvent recevoir la décoration de Saint-Georges, lorsqu’ils se sont illustrés dans quelque combat glorieux. Etil.est de règle de perpétuer dans la flotte russe le nom des navires décorés. C’est ainsi que l’on compte actuellement un croise.urdu nom de. PamyaitAzovà (souvenirld’Azofj, qui commémore la belle conduite du. vaîsseau-amiral VAzof h.la bataille de Na-* vafin. Le navire portant le nom du navire décoré a, dans son pavillon de poupe, l’écusson de Saint-Georges, et le ruban du bonnet des matelots, au lieu d’être noir, comme à l’ordinaire, a les couleurs noire et orange du ruban de l’ordre. Ceci n’a rien de commun avec Je’s fameux trésors espagnols à la recherche desquels se ruinent tant de naïfs. Un M. Kemp vient de découvrir au Transvaal un trésor de 6, 250, 000 fr. en bel or ; cette somme considérable avait été emportée de Pretoria avant l’entrée de l’armée du maréchal Roberts et était restée enfouie depuis lors. L’heureux inventeur devra partager sa trouvaille avec l’Etat ; mais il lui restera encore la jolie somme de 3, 125, 000 fr. avec quoi il pourra désormais vivre de ses rentes. Nouvelles à la Main X fraîchement décoré du ruban vert, se prélasse à la terrasse d’un casino. Enfin, dit quelqu’un, il ne possède aucune connaissance agricole ; comment a-t-il pu se’faire attribuer le « poireau » ? C’est justement cette absence de titres qui prouve son talent de. carottier D’un voyageur grincheux, à propos, des nouvelles voitures Avec ou sans taxamètre, c’est toujours le cocher qui restera le maître1 ! Le Masque de Fei. Nous commencerons demain une nouvelle La Confession du général par la comtesse Lydie Rostoptchine, Puis paraitront successivement un grand roman d’histoire contemporaine de M. Georges de Labruyère La Grande Aventure et une nouvellejeuvre r ? e; BRADA LES BEAUX JOURS DE FLAVIEN Laduerre MSM-japeRâtse LA GRANDE BATAILLE -La grande bataille qu’on nous a déjà tant de fois annoncée comme imminente est enfin engagée. --Un télégramme du chef d’état-major de l’armée de Mandchourie, daté du 30 août, dix heures du matin, et qui est parvenu hier à SaintPétersbourg, fait, en effet, connaître que l’engagement est maintenant général sur tout le front autour de Liao-Yang. 400, 000 hommes vont donc être aux prises, livrant un des plus terribles combats que l’histoire ait enregistrés. L’armée russe est rangée en arc de cercle au sud’et à l’est de la ville, sur lès positions que le général Kouropatkine a depuis longtemps préparées pour recevoir’le choc des Japonais. Elle se coinpose au total d’un peu plus de six corps d’armée:les quatre corps sibériens, ainsi que les 10° et 17a corps d’Europe, en entier le 1er corps, de Saint-Pétersbourg, en cours de débarquement. En tenant compte des pertes subies depuis les débuts de la guerre, on peut évaluer l’effectif de cette armée à 160, 000 fusils, 20, 000 sabres et 600 pièces de campagne; plusieurs bouches à. feude gros calibre arment en outre les redoutes que le commandant en chef de l’armée a fait élever sur les collines qui avoisinent Liao-Yang. Toutes ces forces, bien entendu, ne sont pas déployées en première ligne. Plusieurs dépêches particulières laissent au contraire entendre que de fortes réserves soriVplaçées au nord de la ville, échelonnées dans la direction de Moukden, en arrière de l’aile gauche. : ’C’est évidemment, en effet, de ce côté’ que se produira le principal effort des Japonais. Ceux-ci disposent en Mandenourie de/ 3 armées comprenant au total 9 divisions et. autant de brigades de réserve. Comme les Japonais, maîtres de la mer, ont eu toute facilité pour combler constamment, par des prélèvements effectués sur les dépôts, les vides causés par le feu et les maladies, on peut estimer que leurs effectifs sont au complet. Les forces dont ils disposent’se montent donc à près de 200; 000 combattants avec 700 bouches à feu de campagne ou de montagne. La moitié de ces troupes constitue l’armée du— général Kouroki. placée à l’aile droite du dispositif japonais et chargée d’agir sur les communications des Russes. Ceux-ci se trouvent donc encore dans un état d’infériorité numérique, faible,’il est vrai, et compensé en partie parl’avantage que leur procure l’organisation défensive du champ de bataille. Toutefois, on pouvait se. demandérjusqu’au dernier moment si le général Kouropatkine accepterait la lutte. Les combats livrés du 25 au 29 n’étaient, en effet, que des engagements d’avant-garde, ainsi que le prouve le chiffre relativement minime des pertes éprouvées par les deux adversaires. Il était, par suite, toujours possible aux Russes de rompre le combat et de se replier, vers le nord sous le couvert d’un détachament. qui aurait occupé les abords ^œëdjsets1 de LiaorYang. Ofl a— mèw©