faut ajouter, pour être historien fidèle, que ces brillantes conditions atmosphériques causaient sur l’esprit des habitants de la capitale un contentement intérieur, que tout le monde ne réussissait pas à dissimuler.
Il y a trente ans, le comédien Potier jouait un vaudeville intitulé Les Inconvénients de la diligence. Au troisième acte la diligence était arrêtée par un voleur, qui avait eu l’idée ingénieuse de disposer sur le bord de la route six mannequins vêtus en brigands armés jusqu’aux griffes et dont le terrifiant aspect ajoutait à l’épouvante des habitants de la machine roulante. Mais bientôt le subterfuge était reconnu et les mannequins dévoilés. Cette constatation à peine établie, on voyait Perlet une fois bien sûr de son fait s’élancer avec intrépidité à la gorge de l’un des brigands postiches en s’écriant
— Ah tu n’es qu’un mannequin !
Et le saisissant par sa barbe de filasse il le traînait sur le théâtre, à la grande joie des spectateurs ; il l’accablait de coups de poing et de coups de pied pour se venger des terreurs qu’il avait ressenties en s’écriant toujours :
— Ah ! tu n’es qu’un mannequin !
Ce qui s’est passé après le 13 juin à propos de la comète, rappelait l’histoire du mannequin des Variétés. Toutes les personnes bien plus nombreuses qu’on ne l’imagine qui avaient conçu dé secrètes et de très-réelles alarmes sur le terrible conflit dont la comète nous menaçait de par Matthieu Lænsberg étaient aussi, après ce jour redouté, les plus empressées à accabler de leurs sarcasmes l’astre vagabond, cause innocente de leurs terreurs. Ces intrépides du lendemain n’avaient pas assez de mépris pas assez de colère contre le mannequin céleste qui venait de s’évanouir.
