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de cette idée. L’auteur appuyait son dire d’un brevet pris par lui à Bordeaux, en 1864.

L’exécution des puits par voie d’enfoncement ne constitue pas le système, dit M. Rathsamhausem ; ce n’est qu’un moyen expéditif de l’appliquer. Or, le procédé que M. Rathsamhausen faisait breveter le 15 avril 1864, ne diffère que par cette particularité de celui de M. Norton. L’ancien lieutenant de vaisseau en a fait l’application, depuis plusieurs années, à Bordeaux et aux environs de cette ville. Il ajoute que, dégoûté de l’œuvre par les nombreux désagréments qu’il a essuyés, il a laissé périmer son brevet, et qu’ainsi chacun a le droit d’appliquer cette méthode.

Une autre revendication s’est produite contre l’inventeur anglais. M. Donnet, ingénieur civil à Paris, a voulu établir que le système de M. Norton n’a rien de nouveau, car plusieurs puits ont été déjà creusés par ce même système, en Algérie et en France. Selon M. Donnet, en 1845, le maréchal de logis du génie Vuillemain aurait foré un puits par ce procédé, à Mers-el-Kébir, près d’Oran, en 1847[1].

En définitive l’idée des puits instantanés a dû venir à plusieurs personnes en même temps ; seulement M. Norton l’a rendue pratique.

Nous n’en dirons pas davantage de cette discussion de priorité. Nous avons voulu seulement faire connaître une méthode de forage des puits ordinaires qui peut devenir la source d’applications utiles pour la petite propriété.


CHAPITRE XV

conclusion. — la société du trou.

Nous avons passé en revue, dans cette Notice, les principes scientifiques sur lesquels reposent les puits artésiens, et nous avons décrit les procédés pratiques qui servent à effectuer les forages à de grandes profondeurs. L’avenir du travail industriel et social est intéressé plus qu’on ne le croit, à la question que nous venons de traiter. C’est ce que nous allons essayer d’établir.

L’eau du puits de Grenelle nous arrive, avec la température de 27° ; celle du puits de Passy avec la température de 24°. Mais nous savons que la chaleur s’élève à l’intérieur du globe, de 1° par chaque 33 mètres de profondeur. Dès lors, si l’on exécutait un forage plus de quatre ou cinq fois plus profond que celui de Grenelle, un puits ayant 2 500 mètres au lieu de 548 mètres, qui est la profondeur exacte de celui de Grenelle, l’eau nous arriverait avec la température de 100°.

Comprend-on bien de quelle importance il serait pour l’industrie, pour l’économie domestique, pour la société même, d’avoir, sans frais, de l’eau à 100°, de l’eau bouillante qui ne coûterait rien ? Ce serait une véritable révolution industrielle. La question du chauffage domestique, question capitale et si mal résolue encore, comme nous l’avons vu dans la Notice sur le chauffage, serait immédiatement tranchée par l’application du système de circulation d’eau chaude. Avec cette eau chaude qui ne coûterait rien, le chauffage des ateliers, celui des bains publics, etc., seraient également réalisés sans aucuns frais.

Déjà un industriel du Wurtemberg, M. Bruckmann, utilisant l’eau à 12 degrés que lui fournit un puits artésien de peu d’importance, sait maintenir à 8 degrés pendant tout l’hiver, la chaleur de ses ateliers, même alors qu’au dehors il fait un froid de — 18 degrés.

La question du chauffage domestique ne serait pas la seule dont les puits artésiens à grande profondeur fourniraient une solution économique aussi brillante. L’eau bouillante fournie à bas prix, ce serait de la vapeur à bas prix, par conséquent des machines à vapeur marchant presque sans dépense. Or, une machine à vapeur marchant sans dé-

  1. Voir la Science pour tous du mois d’août 1868.