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l’empêche de sortir. Alors on découvre l’orifice du tube d’amorce, et on y introduit la capsule fulminante fixée à l’extrémité du cordeau de mineur.

Pour mettre le feu à la dynamite, on fend, avec un couteau, l’extrémité libre du cordeau de mineur, on engage dans la fente un morceau d’amadou, on l’allume et on se retire.

Les pétards de dynamite s’appliquent, avons-nous dit, en charges allongées ou concentrées.

Nous représentons dans la figure 107 un pétard de dynamite fixé à la porte d’un fort.

On enfonce au milieu de la porte un pic de terrassier, en le disposant comme le montre notre dessin, et on suspend au fer du pic la dynamite en charge allongée. Le cordeau de mineur étant mis en rapport avec la charge de dynamite, on enflamme le pétard à distance, au moyen d’un exploseur électrique et d’un fil conducteur du courant de la pile.

Le 18 janvier 1871, sur le plateau qui fait face au mont Valérien, l’armée française attaquait les Prussiens, retranchés derrière l’interminable mur du château et du parc de Buzenval. Précédé d’un large fossé, crénelé, que défendaient d’habiles tirailleurs, ce mur était à peu près infranchissable. Il existait, tout à l’extrémité, une porte, que nos artilleurs avaient essayé de défoncer à coups de canon. La porte avait cédé en partie, et nos soldats donnaient l’assaut ; cependant elle tenait bon encore. Un lieutenant du génie, l’héroïque Beau, se jette dans la mêlée, et, suivi d’un sapeur, il va, malgré une pluie de balles, placer un pétard de dynamite sous la porte. Il n’eut pas le temps d’y mettre le feu. Le lieutenant et le sapeur tombèrent presque aussitôt, criblés, chacun, de plus de vingt balles[1].

Au Sénégal, en 1884, un lieutenant d’artillerie de marine, Pol, renouvela cet exploit. Une colonne de soldats français, commandée par le colonel Borgnis-Desbordes, faisait le siège du fort de Kita ; l’entrée du fort était fermée par une porte massive, en bambou ; les obus pénétraient dans la porte et traversaient le bois, mais ils ne pratiquaient pas de brèche. Le lieutenant Pol s’avance jusqu’au pied du fort, il installe deux pétards de dynamite sous la porte, y met le feu… mais il tombe. Quand les soldats, qui s’étaient précipités sur ses pas, et qui, par la brèche, enfin ouverte, avaient pénétré dans l’intérieur du fort, eurent rapporté l’héroïque officier à l’ambulance, il était mourant ; les indigènes l’avaient percé de coups de lances. Le colonel Borgnis-Desbordes le décora sur son lit de mort.

On voit, par ces deux exemples, combien il est utile de posséder des chargements de dynamite convenablement préparés pour une inflammation rapide. À la guerre, la bravoure ne supplée pas toujours à l’insuffisance du matériel et de l’armement.

Revenons aux procédés employés pour l’inflammation de la dynamite. Quand les détachements militaires ne possèdent pas d’outils, pelles, pioches, pour creuser un trou de mine, ou pour forer une pierre, on a recours à la méthode dite des charges successives. Pour cela, on fait détoner une faible charge de dynamite tout contre l’obstacle à détruire. En faisant explosion, cette première charge creuse un logement pour la seconde charge, qui, elle-même, provoque la destruction définitive de l’obstacle.

Pour mettre le feu aux pétards de dynamite, il est trois procédés différents. On peut, ainsi qu’il a été dit plus haut, allumer directement la mèche de mineur qui communique avec l’amorce, et se retirer ; il faut alors avoir soin d’entourer de pulvérin l’ex-

  1. Les camarades de Beau ont fait placer son buste dans la salle d’honneur du collège de Bourg, où il avait fait ses premières études.