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à l’électricité, à moins d’avoir des mèches spéciales.

En tous cas il faut mettre absolument le fulminate de la capsule à l’abri du contact de l’eau. Dans ces conditions, la destruction des écueils sous-marins par la dynamite est une opération élémentaire.

Le sautage des rochers sous-marins a donné l’idée de la pêche à la dynamite. On voit, en effet, après l’explosion d’une charge sous-marine appliquée à faire sauter des rochers sous-marins, les poissons qui se trouvaient dans un certain rayon, arriver à la surface, complètement étourdis. On peut donc employer ce moyen pour la pêche. Hâtons-nous de dire, pourtant, que cette pêche, qui est très destructive, est sévèrement interdite. Elle peut cependant rendre service dans certains cas, quand il s’agit de pêcher dans des étangs particuliers, remplis de souches, où le poisson trouve des retraites inabordables.

Aux États-Unis, le général Henri Abbot a fait de nombreuses recherches pour appliquer la dynamite à détruire d’un seul coup un navire échoué, et faisant obstacle, d’une manière quelconque.

Ces expériences ne sont pas sans mérite. En 1869, quand le général Abbot commença de les entreprendre, le problème était nouveau, et les lois générales concernant l’action des forces développées n’étaient pas connues ; la théorie de ces recherches devait donc être basée sur des moyens de mesure précis. Il fallait, avant tout, employer un appareil capable d’enregistrer avec certitude les effets des explosions sous-marines. L’appareil imaginé par le général Abbot est le cercle dynamométrique, qui se compose d’un anneau en fer et de 6 dynamomètres.

Avec cet appareil, le général Abbot a constaté que la dynamite, le fulmi-coton et la gélatine explosive pouvaient être employés pour les explosions sous-marines.

De fréquentes applications de l’appareil du général Abbot ont été faites, notamment pour faire sauter les navires échoués à l’entrée d’un port, et dont la présence fait obstacle à la navigation.

Au mois de mars 1885, le steamer Lader s’était échoué à l’entrée du port d’Anvers.

« Après des efforts infructreux, écrit M. Châlon, ce steamer s’était brisé en deux tronçons. Le navire, construit en fer, mesurait 86 mètres de longueur, 11 mètres de largeur et 8 mètres de creux. L’épave, quoique se trouvant en dehors de la passe navigable, occasionnait des remous dangereux pour les navires à faible vitesse ; en outre le jeu des marées produisait des affouillements dans le lit du fleuve, tout autour du navire, et les sables entraînés allaient se déposer dans la passe à 300 mètres en amont. Il y avait donc de puissants motifs pour détruire au plus vite cet obstacle à la navigation. Le commandant des pontonniers, M. Simonis, et le commandant des artificiers militaires, M. Collard, furent chargés de l’opération.

« Les deux parties du navire s’étaient séparées ; l’arrière avait glissé latéralement vers l’aval, d’environ 14 mètres. L’un des tronçons mesurait 38 mètres de longueur, l’autre 48 mètres. On commença l’attaque le 16 avril 1885, par le tronçon d’arrière, qui présentait le plus d’obstacle à la navigation. Les charges furent réparties de la façon suivante : 26 kilogrammes de dynamite-gomme contre l’étambot tout près de l’hélice ; 24 kilogrammes de dynamite à la cellulose à un mètre de la charge précédente ; 24 kilogrammes de dynamite-gomme dans le fond, par la claire-voie du salon ; 23 kilogrammes de dynamite-gomme par l’écoutille de chargement. »

À la suite de l’explosion, l’avant fut détruit, mais l’arrière s’enfonça plus profondément dans le lit du fleuve. On fut obligé de pratiquer une ouverture dans la cale, d’y faire pénétrer des plongeurs pour y déposer 23 kilogrammes de dynamite-gomme. Ce n’est qu’après 45 jours de travail, que l’opération fut complètement achevée.

Depuis les essais du général Abbot, on a fait de fréquentes applications de la dynamite pour faire sauter des vaisseaux engloutis.