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CHAPITRE VII

la navigation sous-marine. — les premières tentatives faites par fulton. — bateaux sous-marins construits dans les ports d’amérique, d’angleterre, d’allemagne et en frange. — le « gymnote » et le « peral ». — le nouveau bateau sous-marin le « goubet ».

Il nous reste, pour terminer l’exposé des ressources militaires de la marine actuelle, à signaler une création encore à l’état d’ébauche, mais qui, si elle se perfectionne et devient pratique, jettera un trouble extraordinaire dans tout l’effectif des marines de guerre du monde entier. Nous voulons parler des bateaux sous-marins.

Les officiers et matelots attachés aux bateaux torpilleurs fixent, à grand’peine, et en s’exposant à d’énormes dangers, des brûlots explosifs à la quille des navires ennemis. Mais ils échouent souvent dans ces coups d’audace, en raison de la surveillance et des moyens de défense qu’on leur oppose. Outre les foyers électriques dont les longues projections décèlent au loin leur présence, les filets Bullivan, entourant le navire, peuvent arrêter leur élan. Si, au lieu de naviguer sur la mer, les torpilleurs pouvaient plonger sous l’eau, et aller placer leur infernal engin de destruction au-dessous de la coque du navire, à l’insu de l’équipage, en naviguant hors de sa vue, on conçoit à quels dangers les bâtiments seraient exposés. On ne voit pas de moyen de protection contre un procédé d’attaque aussi perfide.

Hâtons-nous de dire que, malgré de très nombreuses tentatives, le bateau sous-marin n’est pas encore créé ; mais le moment s’approche peut-être où nos vaisseaux auront à s’inquiéter sérieusement de cet effroyable ennemi. Que sera alors la guerre maritime ? Quelle sécurité pourra-t-on espérer à bord des colosses qui sont aujourd’hui l’orgueil de nos flottes ? On ose à peine entrevoir cette triste perspective.

Ce qui peut rassurer, c’est que les recherches concernant la navigation sous-marine sont de date fort ancienne, et qu’elles n’ont pourtant jamais abouti, jusqu’à ce jour, à rien de pratique.

En 1801, ainsi que nous l’avons raconté dans les Merveilles de la science, Fulton avait construit un bateau plongeur, qui était pourvu de deux hélices parallèles, et dont les mouvements d’ascension et de descente s’obtenaient au moyen d’une vis fonctionnant verticalement. Fulton fit des essais de son embarcation sous-marine au Havre et à Rouen. Il accomplit même une partie de la traversée du Havre à Brest, en naviguant sous l’eau.

L’empereur Napoléon Ier n’encouragea pas la tentative de Fulton, pas plus qu’il n’avait accueilli ses fourneaux submergés, c’est-à-dire les torpilles.

La question fut reprise en France, en 1863. L’amiral Bourgeois construisit, à Toulon, un bateau sous-marin, qu’il nommait le Plongeur.

Le Plongeur était en tôle, et affectait la forme d’un cigare aplati. Il jaugeait 450 tonneaux, et mesurait 42 mètres de longueur, sur 6 mètres de largeur et 3 mètres de hauteur, y compris la quille. Il était propulsé par une hélice, que commandait une machine mue par de l’air comprimé à 12 atmosphères, et contenu dans une série de réservoirs cylindriques, d’un volume total de 150 mètres cubes, ce qui suffisait à l’aération du bateau pendant un temps assez long. Les moyens de descente et de remonte se composaient de réservoirs à eau, d’une capacité de 50 mètres cubes, qui pouvaient se remplir ou se vider plus ou moins complètement, par l’effet d’air comprimé. Ces réservoirs, étant remplis d’eau, rendaient le bateau plus lourd que le liquide qu’il déplaçait, et il ne restait plus