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Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 6.djvu/643

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voix ou d’un instrument en état de sonorité. L’extrémité qui termine ce conduit est fermée par une membrane mince, convenablement tendue et qui porte un crayon ou style excessivement léger. Ce crayon, mis en mouvement par les vibrations de la membrane provoquées par les sons, inscrit lui-même la trace de son mouvement sur un papier recouvert de noir de fumée, placé au-devant du crayon, qui se déroule lentement et uniformément par l’effet d’un rouage d’horlogerie. Les traces laissées sur ce papier peuvent ensuite être reproduites et fixées à jamais grâce à la photographie.

« M. Wertheim, un de nos jeunes physiciens, avait déjà obtenu, par des dispositions analogues, l’impression écrite des vibrations du diapason, et il avait rendu plus visibles, par ce moyen, les vibrations sonores des corps, effet que l’on n’avait mis en évidence jusque-là que par l’expérience des lignes nodales, tracées au moyen du sable sur les membranes vibrantes, selon la méthode de Chladni, Duhamel et Savart. Mais M. Scott a singulièrement perfectionné ces dispositions expérimentales, et il a fait une étude approfondie de l’emploi d’un appareil de ce genre pour l’examen des questions délicates qui sont du ressort de l’acoustique.

« Ne pouvant passer en revue toutes les questions de l’acoustique qui pourront recevoir des éclaircissements utiles de l’appareil graphique de M. Scott, nous citerons seulement les principales.

« La question du timbre, par exemple, sur laquelle on est si peu d’accord, pourra recevoir d’excellentes lumières de cette graphie des sons. M, Scott a déjà réuni un certain nombre d’épreuves, qui présentent les sons de la voix comparés à ceux du cornet à piston, du hautbois, du diapason, etc. Les instruments, comme on pouvait le pressentir, se distinguent d’avec les voix par les caractères de leurs vibrations. Ainsi l’accord parfait, donné par le cornet à piston, recueilli sur le noir de fumée, dans l’appareil de M. Scott, donne des figures fort dissemblables, par leurs formes et leurs dimensions, de celles que fournit le même accord parfait émané d’un instrument à cordes ou de la vois humaine. La même différence se remarque dans le tracé graphique que donne le chant comparé avec le tracé des cris explosifs, des rugissements, etc.

« M. Scott a constaté ce fait curieux que le son d’un instrument ou d’une voix fournit une suite de vibrations d’autant plus régulières, plus égales, et par conséquent plus isochrones, qu’il est plus pur pour l’oreille et mieux filé. Dans le cri déchirant, dans les sons aigres des instruments, les ondes de condensation sont irrégulières, inégales, non isochrones. Aussi pourrait-on dire qu’il y a, à ce point de vue, des sons faux et discords d’une manière absolue. Dans une épreuve de M. Scott qui montre les mauvais sons de la voix, c’est-à-dire les sons voilés, on reconnaît avec un peu d’attention, une, quelquefois deux et même trois vibrations secondaires, combinées avec l’onde principale.

« Telles sont les principales questions de l’acoustique qui pourront recevoir des éclaircissements de l’emploi de l’instrument de M. Scott.

« Mais, dira-t-on, à quoi bon cet art nouveau, dont l’exécution paraît si délicate ? Si une question semblable eût été, au commencement de notre siècle, adressée à Volta, l’illustre inventeur de la pile électrique, il eût été, à coup sûr, bien empêché de répondre : « Cela sert à l’analyse chimique, à la galvanoplastie et à la télégraphie. » C’est une réponse analogue que pourrait faire l’auteur du travail qui nous occupe à celui qui lui poserait aussi, à propos de ses recherches, la question du cui bonum ?

« On peut dire dès à présent que la graphie des sons, essayée par M. Scott, est ap-