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rigèrent vers le salon. En passant par le boudoir Pierrette voulut ouvrir la radio, par extraordinaire la radiofusion n’était pas bonne à cette heure tardive de la nuit. Madame des Orties ouvrit le piano et supplia sa fille de bien vouloir exécuter quelque chose.

Elle ne se fit pas trop prier. Guy de Morais en fut surpris ; pour la première fois il entendrait Pierrette jouer, chanter. Combien souvent ne lui en avait-il pas fait la demande ?

Elle cherchait parmi les partitions. Elle les prenait une à une, les mettait de côté ; enfin elle en ouvrit une sur le piano. Le jeune homme se rapprocha avec l’intention de tourner les pages et put lire : « Noël de Augusta Holmès ».

La voix douce et bien timbrée de Pierrette détachait les syllabes, elle chantait avec toute son âme. Elle termina se permettant d’altérer un peu les mots de la partition : « le bonheur pour tous ceux que j’aime ».

Guy de Morais la remercia chaleureusement et ajouta très bas :

— Nous avons tous une place particulière dans votre cœur.

Elle rougit et sans répondre, l’invita à se faire entendre à son tour. Elle s’était levée du tabouret.

— Restez-là, s’il vous plait, vous m’accompagnerez. Malheureusement je ne sais rien en rapport avec la fête du jour. Faites-moi voir quelques-unes de vos partitions.

Après quelque hésitation, il saisit : « Pâle étoile du soir » de Gilis, paroles d’Alfred de Musset.

— Pouvez-vous chanter le soprano, Mademoiselle ? je me chargerai de la basse.

La jeune fille ne répondit pas, mais elle plaqua les premiers accords.

Les deux voix s’harmonisaient à ravir, la voix légère et vibrante de Pierrette n’était jamais couverte par le timbre grave mais harmonieux de celle de son compagnon.