loyauté. On était persuadé qu’il avait conservé intact en son cœur le rayon de la bonté naturelle reçue du Créateur avec le souffle même de la vie. C’est l’histoire de toutes les décrépitudes, à la veille des grandes rénovations sociales et morales. Ainsi, la société usée à Rome, après une longue période d’énervement, a du éprouver un plaisir délicat à savourer la lecture des Bucoliques de Virgile. Elle dut trouver dans la description des mœurs primitives je ne sais quelle fraîcheur d’esprit et quelle ingénuité, bien faite pour tempérer l’excès de corruption morale où elle était plongée !
Mais il y a bien longtemps qu’on s’est détaché de ces vains rêves. Au lieu de placer l’âge d’or dans le passé, la sagacité moderne le place dans l’avenir. C’est qu’il arrive une époque où, de même que l’individu, l’humanité devenue majeure a besoin de toucher à la réalité, sans se laisser fasciner par le prestige de l’imagination. C’est alors à la science, à l’observation qu’on s’adresse pour étudier chaque phénomène. Cette rigidité de méthode est le résultat d’une longue éducation intellectuelle qui a gagné insensiblement les esprits et les conduit aujourd’hui à ne reconnaître pour vrai que ce dont la preuve peut être administrée d’une façon rationnelle. Elle offre une garantie positive à la majorité de ceux qui sont obligés de se rapporter à l’autorité des savants, ne pouvant poursuivre eux-mêmes les investigations qui mènent à la vérité. Appliquée à l’anthropologie, cette méthode ne peut qu’y projeter une éclatante lumière, aussi est-ce pourquoi nous y reviendrons, à chaque fois qu’il s’agira d’éclaircir les faits dont la fausse interprétation accréditerait éternellement les plus désolantes erreurs, si on n’y prenait garde.
Quand on considère bien l’histoire de l’évolution sociale, on voit immédiatement que la réalisation du progrès est attachée à deux conditions essentielles : l’aptitude native