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Page:Flammarion - La Fin du monde, 1894.djvu/200

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LA FIN DU MONDE

que l’effroi de la fin du monde en est la conséquence toute naturelle. Que l’on se représente l’état d’esprit des habitants d’Herculanum et de Pompéi lors de l’éruption du Vésuve qui vint les engloutir sous une pluie de cendres ! N’était-ce pas pour eux la fin du monde ? Et, plus récemment, les témoins de l’éruption du Krakatoa qui purent y assister sans en être victimes n’eurent-ils pas absolument la même conviction ? Une nuit impénétrable, qui dura dix-huit heures ; l’atmosphère transformée en un four plein de cendres bouchant les yeux, le nez et les oreilles ; la canonnade sourde et incessante du volcan ; la chute des pierres ponces tombant du ciel noir, la scène tragique n’étant éclairée par intermittences que par les éclairs blafards ou les feux follets allumés aux mâts et aux cordages du navire ; la foudre se précipitant du ciel dans la mer avec une crépitation satanique, puis la pluie de cendres se changeant en une pluie de boue, — voilà ce que subirent pendant cette nuit de dix-huit heures, du 26 au 28 août 1883, les nombreux passagers d’un navire de Java, tandis qu’une partie de l’île de Krakatoa sautait en l’air, que la mer, après s’être reculée du rivage, arrivait sur les terres avec une hauteur de trente-cinq mètres jusqu’à une distance de un à dix kilomètres du rivage et sur une longueur de cinq cents kilomètres, et en se retirant emportait dans l’abîme quatre villes : Tjringin, Mérak, Telok-Bétong, Anjer, tout ce qui peuplait la côte, plus de quarante