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LA FIN DU MONDE

mort des individus, des espèces et des mondes, nous constatons que le Progrès régit la nature et que tout être créé évolue constamment vers un degré supérieur. Chacun veut monter. Nul ne veut descendre.

À travers les métamorphoses séculaires de la planète, l’humanité avait continué de grandir dans le progrès, dans ce progrès qui est la loi suprême, et depuis les origines de la vie sur la Terre jusqu’au jour où les conditions d’habitabilité du globe commencèrent à décroître, tous les êtres vivants s’étaient développés en beauté, en richesse d’organes et en perfections. L’arbre de la vie terrestre, inauguré au temps des protozoaires rudimentaires, acéphales, aveugles, sourds, muets, presque entièrement dépourvus de sensibilité, s’était élevé dans la lumière, avait acquis successivement les merveilleux organes des sens, et avait abouti à l’homme qui, perfectionné lui-même de siècle en siècle, s’était lentement transformé, depuis le sauvage primitif, esclave de la nature, jusqu’au souverain intellectuel qui avait dominé le monde et avait fait de la Terre un paradis de bonheur, d’esthétique jouissance, de science et de volupté.

La sensibilité nerveuse de l’homme avait acquis un développement prodigieux. Les six sens anciens, la vue, l’ouïe, l’odorat, le toucher, le goût, le sens génésique s’étaient graduellement élevés au-dessus des grossières sensations primitives pour atteindre une délicatesse exquise. Par l’étude des