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APRÈS LA FIN DU MONDE

Nous ne concevons pas, nous ne comprenons pas l’infini, dans l’espace ou dans la durée, parce que nous en sommes incapables, mais cette incapacité ne prouve rien contre l’absolu. Tout en avouant que nous ne comprenons pas, nous sentons que l’infini nous environne et qu’un espace limité par un mur, par une barrière quelconque, est une idée absurde en soi, de même qu’à un moment quelconque de l’éternité nous ne pouvons pas ne pas admettre la possibilité de l’existence d’un système de mondes dont les mouvements mesureraient le temps sans le créer. Est-ce que nos horloges créent le temps ? Non. Elles ne font que le mesurer. Nos mesures de temps et d’espace s’évanouissent devant l’absolu. Mais l’absolu demeure.

Nous vivons dans l’infini sans nous en douter. La main qui tient cette plume est composée d’éléments éternels et indestructibles, et les atomes qui la constituent existaient déjà dans la nébuleuse solaire dont notre planète est sortie, et au delà des siècles ils existeront toujours. Vos poitrines respirent, vos cerveaux pensent, avec des matériaux et des forces qui agissaient déjà il y a des millions d’années, et qui agiront sans fin. Et le petit globule que nous habitons est au fond de l’infini, — non point au centre d’un univers borné, — au fond de l’infini, aussi bien que l’étoile la plus lointaine que le télescope puisse découvrir.

La meilleure définition de l’univers qui ait été