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Page:Flat - Essais sur Balzac, 1893.djvu/26

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chapitre premier.

la société, le problème des différenciations individuelles ou des déformations du type primitif se présente à lui. — « La société ne fait-elle pas de l’homme, suivant les milieux où son action se déploie, autant d’hommes différents qu’il y a de variétés en zoologie ? » — Ici encore comme plus haut, il vit puissamment et profondément ; il pénétra jusqu’à la cause véritable et eut le mérite de la formuler, peut-être le premier, en ce qui touche l’espèce sociale. Il eut la hardiesse de prononcer le mot qui, érigé plus tard en doctrine, repris et développé par de purs savants[1], devait faire leur fortune et établir leur réputation. La théorie des milieux n’est-elle pas en effet le point essentiel de la conception scientifique à laquelle se rattache le nom de Darwin ? Pour les naturalistes d’aujourd’hui, c’est une vérité incontestable que les êtres vivants se sont modifiés en cent espèces diverses sous l’action de milieux différents. Pour les animaux, du moins pour la plupart, le seul dont il puisse être question est le milieu physique et matériel. Avec l’homme, les choses changent ; à l’action de celui-ci s’ajoute celle d’un nouveau qui parfois contrarie le premier, mais toujours se combine avec lui, et dont les effets l’emportent en gravité sur les effets du milieu physique : c’est le milieu social. L’action qu’il exerce se manifeste de la même manière. Il ne s’agit pas, dans l’esprit de Balzac, d’une simple figure de rhétorique, d’une comparaison litté-

  1. M. Taine en est le plus illustre exemple