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DE GUSTAVE FLAUBERT.

J’ai horriblement souffert, cher Ernest, depuis que tu ne m’as vu, et j’ai considéré combien la vie humaine était diaprée de fleurs et festonnée d’agréments. Je passerai tout l’été à la campagne, à Trouville ; je voudrais y être. Je soupire après le soleil.

Sais-tu jusqu’où doit aller ma tristesse, et comprends-tu que je vive… ? La pipe, oui la pipe, oui, tu as bien lu, la pipe, cette vieille pipe :


la pipe m’est défendue !!!


moi qui l’aimais tant, moi qui n’aimais que ça, avec le grog froid en été et le café en hiver !

J’irai probablement à Paris avant six semaines, deux mois, pour mettre ordre à mes affaires, puis je reviendrai ici. Je suis comme un melon. Heureusement que ce melon ne coule pas ! Il ne manquerait plus que cela.

Et toi, vieux ? toujours la thèse de l’usufruit ? C’est aussi une fière maladie ; mais tu en seras bientôt débarrassé. Adieu, présente mes respects, ou plutôt dis des cochonneries de ma part aux sieurs Dumont et Coutil, et si l’on demande comment je vais, dis : très mal ; il suit un régime stupide ; quant à la maladie elle-même, il s’en fout bien.

Adieu, vieux.


86. AU MÊME.
7 juin [1844]

Eh quoi ! pauvre vieux bougre, tu es toujours c… par ta sacrée santé, embêté par la maladie, for-