Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 1.djvu/218

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
170
CORRESPONDANCE

promène dans ces églises italiennes, à l’ombre des marbres, sous la lumière du jour rose qui passe à travers les rideaux rouges, en regardant les cous bruns des femmes agenouillées ; pour coiffure, elles ont toutes de grands voiles blancs et de longs pendants d’oreille en or ou en argent. Il doit être doux d’aimer là, le soir, caché derrière les confessionnaux, à l’heure où l’on allume les lampes. Mais tout cela n’est pas pour nous ; nous sommes faits pour le sentir, pour le dire et non pour l’avoir. Où en est ton roman ? Avance-t-il ? En es-tu content ? Il me tarde d’en voir l’ensemble. Ne pense qu’à l’Art, qu’à lui et qu’à lui seul, car tout est là ! Travaille, Dieu le veut ; il me semble que cela est clair.

Je m’attendais à avoir une lettre de toi à Gênes ; j’en aurais eu bien besoin ; peut-être en aurai-je ? Nous partons dans six ou sept jours. Hamard et Caroline s’embarquent pour Naples. Écris-moi de suite à Genève. Tu m’avais promis de m’écrire souvent. Mets-toi à ma place et demande-toi si tu n’aurais pas de la joie, en pays étranger, de retrouver un compatriote.

Adieu, cher Alfred, tu sais si je t’aime et si je pense à toi.

Mille adieux et embrassades.


94. AU MÊME.
Milan, 13 mai [1845].

J’ai encore quitté cette pauvre Méditerranée !! Je lui ai dit adieu avec un étrange serrement de