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Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 2.djvu/317

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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Ramsin[1], autrement dit Simoun, meurtrier en poésie. Nous avons vu partout par là des choses, Monsieur, que l’on ne verrait pas à Paris, même en payant. Ô le désert ! Ô le désert !

À quelque jour, quand tu viendras au coin du feu y rôtir la semelle de tes bottes, je pourrai te faire part de mes impressions de voyage qui, pour être moins blagueuses que celles du sieur Dumas, ne laisseront pas, peut-être, de t’amuser tout autant.


284. À LOUIS BOUILHET.
Rome, 4 mai 1851.

Après-demain je pars de Rome ; et d’une encore ! Je commençais à y bien vivre. On peut s’y faire une atmosphère complètement idéale et vivre à part, dans les tableaux et les marbres. J’en ai dévoré le plus que j’ai pu. Quant à l’antique, on est froissé d’abord de ne pas l’y rencontrer, et il est certain qu’il est considérablement étouffé. Comme ils ont gâté Rome ! Je comprends bien la haine que Gibbon s’est sentie pour le christianisme en voyant dans le Colisée une procession de moines ! Il faudrait du temps pour bien se reconstruire dans la tête la Rome antique, encrassée de l’encens de toutes les églises. Il y a des quartiers pourtant, sur les bords du Tibre, de vieux coins pleins de fumier, où l’on respire un peu. Mais les belles rues ! Monsieur ! Mais les étrangers ! Mais la semaine sainte et la via Condotti

  1. Khamsin.