Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 3.djvu/8

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
2
CORRESPONDANCE

que je suis à ces corrections, j’en ai les nerfs fort agacés. Je me dépêche et il faudrait faire cela lentement. Découvrir à toutes les phrases des mots à changer, des consonances à enlever, etc. ! est un travail aride, long et très humiliant au fond. C’est là que les bonnes petites mortifications intérieures vous arrivent. J’ai lu mes vingt dernières pages hier à Bouilhet qui en a été content ; pourtant, dimanche prochain je lui relis tout. Je ne rapporterai rien ; avec toi j’ai de la coquetterie, et je ne te montrerai pas une ligne avant que je n’aie complètement fini, quelque envie que j’aie de faire le contraire. Mais c’est plus raisonnable ; tu n’en jugeras que mieux et n’en auras que plus de plaisir si c’est bon. Encore une longue année !

J’ai reçu l’eau Taburel, l’article et la poudre. Pourquoi la poudre ? Je me sers depuis des années d’odontine de Lepelletier, qui est une très bonne chose. Enfin je vais user de cette poudre en ton honneur.

Les vers du Pays sont parus[1]. (Merci pour nous deux, ma pauvre chérie.) Un journal de Rouen les a reproduits le lendemain. Hier j’ai été voir à Rouen une ascension aérostatique de Poittevin[2] ; c’est fort beau. J’ai été dans une vraie admiration. — De tes deux pièces de vers, il n’y a de vraiment bon que le milieu de la Place-Royale[3] ; la fin est bien molle. Pourquoi donc ne donnes-tu pas plus cours à ton talent pittoresque ? Tu es plus pittoresque et dramatique que sentimentale, retiens

  1. Poème sur Pradier. Voir Correspondance, II, lettres 329, 332.
  2. Aéronaute, qui au cours de quelques unes de ses ascensions, exécutait les exercices d’acrobatie les plus périlleux.
  3. Poème dans Ce qui est dans le cœur des femmes, 1 vol., 1852.