Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 4.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
31
DE GUSTAVE FLAUBERT.

n’en ai nul besoin. Garde-les ou rends-les-moi, ça m’est égal. Mais tu as l’air de vouloir me faire comprendre ceci : « Patientez, brave homme, ne soyez pas inquiet : on vous rendra votre pauvre argent ; ne pleurez pas. »

J’en donnerais seize cents pour ne plus en entendre parler du tout. Mais n’est-ce pas toi qui aimes moins ? Examine ton cœur et réponds-toi à toi-même. Quant à me le dire à moi, non ; ces choses-là ne se disent pas, parce qu’il faut toujours avoir du sentiment, et du fort et du criard ! Mais le mien, qui est minime, imperceptible et muet, reste toujours le même aussi ! Ton sauvage de l’Aveyron t’embrasse.


459. À LOUISE COLET.

En partie inédite.

[Croisset] Nuit de jeudi [2-3 mars 1854].

Oui, tu as raison, bonne Muse, cessons de nous quereller, embrassons-nous, passons l’éponge sur tout cela. Aimons-nous chacun à notre manière, selon notre nature. Tâchons de ne pas nous faire souffrir réciproquement. Une affection quelconque est toujours un fardeau qu’on porte à deux. Que celui qui est plus petit se hausse pour que tout le poids ne lui tombe pas sur le nez ! Que celui qui est plus grand se baisse pour ne pas écraser son compagnon ! Je ne te dis plus rien que ceci : tu m’apprécieras plus tard. Quant à toi, c’est tout apprécié ; aussi je te garde ! J’ai reçu ce matin