lée. » Je ne pardonne pas plus cette phrase à M. de Maistre que je ne pardonne tous leurs jugements à MM. Stendhal, Veuillot, Proudhon. C’est la même race quinteuse et anti-artiste. Le tempérament est pour beaucoup dans nos prédilections littéraires. Or, j’aime le grand Voltaire autant que je déteste le grand Rousseau, et cela me tient au cœur, la diversité de nos appréciations. Je m’étonne que vous n’admiriez pas cette grande palpitation qui a remué le monde. Est-ce qu’on obtient de tels résultats quand on n’est pas sincère ? Vous êtes, dans ce jugement, de l’école du XVIIIe siècle lui-même, qui voyait dans les enthousiasmes religieux des mômeries de prêtres. Inclinons-nous devant tous les autels. Bref, cet homme-là me semble ardent, acharné, convaincu, superbe. Son « Écrasons l’infâme » me fait l’effet d’un cri de croisade. Toute son intelligence était une machine de guerre. Et ce qui me le fait chérir, c’est le dégoût que m’inspirent les voltairiens, des gens qui rient sur les grandes choses ! Est-ce qu’il riait, lui ? Il grinçait ! […]
Mais vous m’échappez souvent ; vous avez pour moi des côtés fuyants, des ambiguïtés où je me perds. Je ne puis allier votre libéralisme intellectuel avec votre attachement pour la tradition catholique. Il y a eu dans votre vie, dans votre passé, que je ne connais nullement, des pressions, des contraintes, et comme une longue maladie dont il vous reste quelque chose. Vous me dites que je vous regarde quelquefois avec ironie ; jamais, je vous le jure bien, mais avec étonnement et plutôt, tranchons le mot, avec méfiance. Vous me faites peur parfois. Vous me quittez brusquement quand