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CORRESPONDANCE

Non ! Mon vieux, ne va pas croire que les beaux sujets font les bons livres. J’ai peur, après la confection de Salammbô, d’être plus que jamais convaincu de cette vérité. Rumine-la pendant que, pour toi, il en est temps encore.

Adieu, porte-toi bien, je t’embrasse.


651. À MADAME JULES SANDEAU.
Dimanche [5 août 1860].

Je m’ennuie de vous extrêmement. De jour en jour j’attends de vos nouvelles — et comme elles n’arrivent pas, je vous en demande.

Que faites-vous ? Que devenez-vous ? Que lisez-vous ? etc. ! etc. ! L’atroce été que nous avons vous jette-t-il un peu de noir dans l’âme ? Moi, je me rôtis les tibias devant ma cheminée, comme en décembre — en ruminant un tas de vieilles choses, et bâtissant encore (comme si j’étais jeune !) des plans de livres, de voyages et de vie. Je pousse de grands soupirs. Je fume pipes sur pipes, puis je retourne à ma table. Telle est la façon diaprée dont s’écoulent mes jours. Les angoisses de la littérature succèdent aux aplatissements de l’existence. Et toujours ainsi ! Cela alterne — c’est un duo, une harmonie.

J’entremêle mes lectures puniques (qui ne sont pas légères) d’autres facéties graves. Je me livre maintenant au volumineux bouquin de mon ami le Dr Pouchet sur les générations spontanées.

Je regrette de ne pas être un savant, et puis…