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DE GUSTAVE FLAUBERT.

condition de l’Art, je ne puis me résigner à écrire de telles platitudes, bien qu’on les aime actuellement. Quant au second, dont j’aime l’ensemble, j’ai peur de me faire lapider par les populations ou déporter par le gouvernement, sans compter que j’y vois des difficultés d’exécution effroyables.

De plus, le printemps me donne des envies folles de m’en aller en Chine ou aux Indes, et la Normandie avec sa verdure m’agace les dents comme un plat d’oseilles crues.

De plus, j’ai des crampes à l’estomac. Voilà tout.

Et vous ? Avancez-vous ? êtes-vous contents ? Les dîners du samedi durent-ils toujours ?

Claudin a eu l’amabilité de m’envoyer un compte rendu de Folammbô[1] ; c’est une attention délicate dont je lui sais gré.

Avez-vous suffisamment vitupéré Sainte-Beuve et engueulé l’Académie à propos de la nomination Carné ?

Je lis maintenant l’Hist[oire] du consulat d’un bout à l’autre, et je pousse des rugissements. Il n’est pas possible d’être plus foncièrement médiocre et bourgeois que ce monsieur-là ! Quel style ! et quelle philosophie !

Je compte toujours vous voir à la fin du mois.

Je vous embrasse sur vos quatre joues en vous serrant les mains tendrement.


  1. Folammbô ou les Cocasseries carthaginoises, pièce en 4 tableaux, par Laurencin (Paul-Aimé Chapelle) et Clairville (Palais-Royal, 1er  mai 1863).