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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Dites-moi que non. Cet affreux été n’est bon ni pour les légumes, ni pour les poires, ni pour les gens ! Moi, il commence à m’agacer le système. On ne se doute pas ordinairement combien le soleil nous est indispensable. Quelle drôle d’idée ont eue nos ancêtres en venant vivre sous des cieux aussi incléments ! Pourquoi habiter des pays bêtes ? Afin d’avoir plus d’esprit, sans doute.

En ce moment, je fais travailler le mien d’une façon acharnée. J’ai repoussé tous les livres et j’écris, c’est-à-dire je barbote dans l’encre sans discontinuer. Me voilà à la partie la plus rude (et qui peut être la plus haute) de mon infernal bouquin, c’est-à-dire à la métaphysique ! Faire rire avec la théorie des idées innées ! Voyez-vous le programme ? Enfin, j’espère au commencement de septembre n’avoir plus que deux chapitres ! Mais je suis encore loin de la terminaison totale. Alors je pousserai un beau ouf de satisfaction, je vous en réponds. Il faut être fou pour avoir entrepris une pareille tâche. Mais nous ne ferions rien, dans ce monde, si nous n’étions guidés par des idées fausses. C’est une remarque de Fontenelle, que je ne trouve point sotte.

La mort du Prince impérial, qui m’a frappé comme une image d’Épinal, tant elle est violente et sauvagesque, commence à devenir une scie ; ne trouvez-vous pas ? J’étais à Paris aux premières loges, quand la nouvelle en est venue, et j’ai contemplé la gigantesque bêtise de Messieurs les bonapartistes. La Princesse a été très affligée et très raisonnable, et le Prince plein de réserve.

Autre scie, la loi Ferry. Ceux qui la défendent et ceux qui l’attaquent m’embêtent également,