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CORRESPONDANCE

petit travail. Puis il faudra les faire comprendre et les rendre plastiques. Je crois qu’on n’a pas encore tenté le comique d’idées. Il est possible que je m’y noie, mais si je m’en tire, le globe terrestre ne sera pas digne de me porter. Enfin, il faut bien avoir une marotte pour se soutenir dans cette chienne d’existence ! J’avais si peu dormi cet hiver et tant pris de café que j’ai eu des battements de cœur et des tremblements qui m’ont inquiété. Grâce à la privation absolue de café et au bromure de potassium, ils ont à peu près disparu ; je me retrouve d’aplomb.

Et vous, pauvre chère amie, comment tolérez-vous vos longues journées de souffrances ? Que vous êtes patiente et que je vous admire ! Comme je voudrais pouvoir alléger un peu vos douleurs ! Mme Guyon me parle de vous quelquefois. Je n’ai pas encore vu *** ; elle m’amuse peu, je la trouve bourgeoise, et puis je n’ai pas le temps d’aller la voir. Je n’ai pas encore été chez Mme Viardot ni mis les pieds dans un théâtre. Pourvu qu’on ne me dérange pas de ma niche, c’est tout ce que je demande au ciel. Mon volume va me remettre un peu de monnaie dans l’escarcelle, car on me paye très cher. Si je pouvais tous les ans en faire un semblable, je me trouverais fort à l’aise. Plus que jamais j’ai envie d’écrire la Bataille des Thermopyles ! Encore un rêve qui vient à la traverse des autres !

Allons, adieu, pensez à moi.

Mot de la fin : l’autre jour, après l’enterrement de Mme André, Alexandre Dumas m’a reconduit jusqu’à ma porte et, à propos de Mme Sand, m’a