Page:Flaubert Édition Conard Correspondance 8.djvu/400

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
394
CORRESPONDANCE

Midi et demi.

Tout en buvant une horrificque tasse de cawoueh pour me monter le coco (chose bien inutile, car il est très monté) et en méditant le plan de la lettre publiable, il m’est venu à l’idée de m’adresser à Raoul-Duval, lequel est le meilleur bougre de la terre. De cela j’en suis sûr ; on dira de lui tout ce qu’on voudra, mais c’est un brave. Il connaît tout le monde, est bien vu individuellement de tous les partis et peut-être pourra-t-il t’indiquer des démarches utiles. Il connaît à fond la magistrature, en ayant fait partie lui-même. Peut-être même est-il très bien avec le ministre de la Justice, à moins qu’il ne soit très mal ? Ça n’y fait rien, va le voir ! et demande-lui des conseils ; il sera flatté. Enfin, si les choses tournent mal, si tu es condamné à Etampes, tu en rappelleras à Paris, et alors il faudra prendre un grand avocat et faire un bouzin infernal. Raoul-Duval, dans ce cas-là, serait bon. Mais nous n’en sommes pas encore là. Avec un peu d’adresse on peut tout arrêter.

La lettre pour le Gaulois est difficile, à cause de ce qu’il ne faut pas dire. Je vais tâcher de la faire la plus dogmatique possible. Sur ce, je commence mes billets pour tes protecteurs dont il faut user ; après quoi je me mettrai à l’œuvre. (Tu l’auras, j’espère, demain soir).

Hier, j’ai écrit à Charpentier pour ton volume.

J’ai peur que ton avocat, pour se donner du relief, ne te fasse faire des bêtises. Maintenant, je vais piquer un chien si c’est possible, et quand j’aurai fait ma nuit… Tranquillise-toi.