pas dégrader son idéal, il tourna sur ses talons et se mit à faire une cigarette.
Elle le contemplait, tout émerveillée.
— « Comme vous êtes délicat ! Il n’y a que vous ! Il n’y a que vous ! »
Onze heures sonnèrent.
— « Déjà ! » dit-elle ; « au quart, je m’en irai. »
Elle se rassit ; mais elle observait la pendule, et il continuait à marcher en fumant. Tous les deux ne trouvaient plus rien à se dire. Il y a un moment, dans les séparations, où la personne aimée n’est déjà plus avec nous.
Enfin, l’aiguille ayant dépassé vingt-cinq minutes, elle prit son chapeau par les brides, lentement.
— « Adieu, mon ami, mon cher ami ! Je ne vous reverrai jamais ! C’était ma dernière démarche de femme. Mon âme ne vous quittera pas. Que toutes les bénédictions du ciel soient sur vous ! »
Et elle le baisa au front, comme une mère.
Mais elle parut chercher quelque chose, et lui demanda des ciseaux. Elle défit son peigne ; tous ses cheveux blancs tombèrent. Elle s’en coupa, brutalement, à la racine, une longue mèche.
— « Gardez-les ! Adieu ! »
Quand elle fut sortie, Frédéric ouvrit sa fenêtre, Mme Arnoux, sur le trottoir, fit signe d’avancer à un fiacre qui passait. Elle monta dedans. La voiture disparut.
Et ce fut tout.