Page:Flaubert - Madame Bovary, Conard, 1910.djvu/413

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était vaporeuse, la Française libertine, l’Italienne passionnée.

— Et les négresses ? demanda le clerc.

— C’est un goût d’artiste, dit Homais. — Garçon ! deux demi-tasses !

— Partons-nous ? reprit à la fin Léon s’impatientant.

Yes.

Mais il voulut, avant de s’en aller, voir le maître de l’établissement et lui adressa quelques félicitations.

Alors le jeune homme, pour être seul, allégua qu’il avait affaire.

— Ah ! je vous escorte ! dit Homais.

Et, tout en descendant les rues avec lui, il parlait de sa femme, de ses enfants, de leur avenir et de sa pharmacie, racontait en quelle décadence elle était autrefois, et le point de perfection où il l’avait montée.

Arrivé devant l’Hôtel de Boulogne, Léon le quitta brusquement, escalada l’escalier, et trouva sa maîtresse en grand émoi.

Au nom du pharmacien, elle s’emporta. Cependant, il accumulait de bonnes raisons ; ce n’était pas sa faute, ne connaissait-elle pas M. Homais ? pouvait-elle croire qu’il préférât sa compagnie ? Mais elle se détournait ; il la retint ; et, s’affaissant sur les genoux, il lui entoura la taille de ses deux bras, dans une pose langoureuse toute pleine de concupiscence et de supplication.

Elle était debout ; ses grands yeux enflammés le regardaient sérieusement et presque d’une façon terrible. Puis des larmes les obscurcirent, ses paupières roses s’abaissèrent, elle abandonna ses