Page:Flaubert - Madame Bovary, Conard, 1910.djvu/645

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avait prêté un vénérable ecclésiastique de ses amis, qui a lu cette scène, qui en a été touché jusqu’aux larmes, et qui n’a pas imaginé que la majesté de la religion pût en être offensée. Ce livre est intitulé : Explication historique, dogmatique, morale, liturgique et canonique du catéchisme, avec la réponse aux objections tirées des sciences contre la religion par M. l’abbé Amboise Guillois, curé de Notre-Dame du Pré au Mans, 6e édition, etc., ouvrage approuvé par son Éminence le cardinal Gousset, N. N. S. S. les Évêques et Archevêques du Mans, de Tours, de Bordeaux, de Cologne, etc., tome 3e , imprimé au Mans par Charles Monnoyer, 1851. Or, vous allez voir dans ce livre, comme vous avez vu tout à l’heure dans Bossuet, les principes et en quelque sorte le texte des passages qu’incrimine M. l’Avocat impérial. Ce n’est plus maintenant M. Sainte-Beuve, un artiste, un fantaisiste littéraire que je cite ; écoutez l’Église elle-même :

« L’extrême-onction peut rendre la santé du corps si elle est utile pour la gloire de Dieu… » et le prêtre dit que cela arrive souvent. Maintenant voici l’extrême-onction :

« Le prêtre adresse au malade une courte exhortation, s’il est en état de l’entendre, pour le disposer à recevoir dignement le sacrement qu’il va lui administrer.

« Le prêtre fait ensuite les onctions sur le malade avec le stylet, ou l’extrémité du pouce droit qu’il trempe chaque fois dans l’huile des infirmes. Ces onctions doivent être faites surtout aux cinq parties du corps que la nature a données à l’homme comme les organes des sensations, savoir : aux yeux, aux oreilles, aux narines, à la bouche et aux mains.

« À mesure que le prêtre fait les onctions (nous avons suivi de point en point le Rituel, nous l’avons copié), il prononce les paroles qui y répondent.

« Aux yeux, sur la paupière fermée : Par cette onction sainte et par sa pieuse miséricorde, que Dieu vous pardonne tous les péchés que vous avez commis par la vue. Le malade doit, dans ce moment, détester de nouveau tous les péchés qu’il a commis par la vue : tant de regards indiscrets, tant de curiosités criminelles, tant de lectures qui ont fait naître en lui une foule de pensées contraires à la foi et aux mœurs. »

Qu’a fait M. Flaubert ? Il a mis dans la bouche du prêtre, en réunissant les deux parties, ce qui doit être dans sa pensée et en même temps dans la pensée du malade. Il a copié purement et simplement.

« Aux oreilles : Par cette onction sainte et par sa pieuse miséricorde, que Dieu vous pardonne tous les péchés que vous avez commis dans le sens de l’ouïe. Le malade doit, dans ce moment, détester de nouveau toutes les fautes dont il s’est rendu coupable en écoutant avec plaisir des médisances, des calomnies, des propos déshonnêtes, des chansons obscènes.