Page:Flaubert - Notes de voyages, I.djvu/189

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ne reste plus que les quatre murailles, font l’effet d’un damier régulier. — Ruines d’une mosquée, avec une colonne de granit sur laquelle est une croix grecque : des colonnes pareilles servent de seuils dans plusieurs endroits. La porte d’entrée était du côté du Nord. Par les brèches des murs on voit de grandes longueurs du Nil ; il a de larges îles de sable. De l’autre côté du Nil, le désert ; au second plan du désert, un arbre tout seul, à droite ; un peu plus loin, deux à gauche.

L’ensemble de cette ruine sent la fièvre, on pense à des gens ennuyés, s’y mourant de marasme : c’est de l’Orient moyen âge, mameluk, barbare. La citadelle, bâtie tout à pic sur le rocher, appartenait jadis aux mameluks, qui dominaient le fleuve. Elle est généralement bâtie en pierres sèches ; quelques parties, mais rares, aux angles plutôt, sont en pierres taillées.

Il fait un grand silence, personne, personne, je suis seul, deux oiseaux de proie planent sur ma tête, j’entends de l’autre côté du Nil, dans le désert, la voix d’un homme appeler quelqu’un.

Je suis revenu à la nuit tombante lentement et regardant de partout l’ombre noire qui s’étendait. À ma gauche, un long ravin qui conduit dans le désert ; sur le flanc de la ravine serpente un sentier, chemin d’hyène. Il y en a beaucoup par ici ; le soir, le raïs nous avertit de ne pas nous écarter du bateau ; l’année dernière, un Turc a été mangé à la première cataracte avec son cheval. Maxime, inquiet de ma longue promenade, avait envoyé des matelots à ma rencontre.

Lundi 1er avril, seconde visite à la forteresse avec Maxime.