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NOTES DE VOYAGES.

Nice. — L’Hôtel des Étrangers. — M. Ferdinand, joli homme, jolie chevelure, belle tenue ; il doit avoir devant sa maîtresse un extérieur convenable et décent, et lui dire seulement dans ses moments de bienveillance égrillarde : «  Petite gamine ! » — Sur la grande place nous avons regardé les troupes manœuvrer. Il y a loin de là à une armée française (tout en France n’est guère beau que par l’ensemble ; son génie est l’unité ; chez elle, c’est la réunion qui fait la force, l’équilibre qui fait la grâce). — Grand rocher au milieu de la ville : forçats faisant sauter la mine. — Prêtres, moines. — La mer pure et douce. — Pauvre Germain[1] ! je n’ai pas même su la maison où il mourut. S’il eût vécu, si je l’avais retrouvé là, comme nous nous serions promenés et comme nous aurions causé ! mais non, non, rien, rien ; toujours et de tout c’est ainsi. — Grand jardin en terrasses superposées : grande vue de terrain et de montagne à gauche ; la ville au pied des montagnes ; le golfe, la mer en face ; Antibes à droite. — Mauvais goût des jardins. — Peintures prétentieuses et nombreuses. — Projet de voyage à Naples. Quelle rage ! quelle peur !

Promenade en calèche dans la vallée de la rivière de Nice, sur le côté droit du torrent ; revenus sur le côté gauche. — Notre loueur de maisons de campagne, figure maigre, nez rouge et gros, museau allongé, bas blancs, souliers lacés, redingote grasse, chapeau idem sur le derrière de la tête. — Canu le jeune, figure d’ancienne comédie, de parasite et de ruffian qui reçoit des piles ; il

  1. Germain des Hogues. (Voir Correspondance, I, p. 153.)