Page:Flaubert - Notes de voyages, I.djvu/299

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et là, à des places rares, de petites fenêtres irrégulières ; ce sont les murs de derrière des maisons qui l’entourent.

Rentré à l’hôtel, j’ai lu la Passion dans les 4 évangélistes. — Sieste. — Dîner chez Botta, homme en ruines, homme de ruines, dans la ville des ruines ; nie tout, et m’a l’air de tout haïr si ce n’est les morts ; rappelle le moyen âge de tous ses vœux, admire M. de Maistre. Il apprend maintenant le piano et avoue qu’il n’est pas un creuseur. C’est une phase de la vie de cet homme : fatigué de tentatives (sa vie en est un tissu, médecin, naturaliste, archéologue, consul), il a essayé de celle-là, il n’en veut pas d’autre, c’est assez. « Que l’humanité soit comme moi », disent tous ceux qui ne peuvent soit la dominer, soit la comprendre. Son chancelier, néo-catholique, partisan de la musique sérieuse, ignore Hummel, Spohr, Mendelshonn, etc., m’assomme avec des Haendel que je ne l’avais pas prié de me jouer ; sa main droite allait plus vite que la gauche. Pauvres bougres, en définitive.

Saint-Sépulcre. — Samedi, visite au Saint-Sépulcre. L’extérieur, avec ses parties romanes, nous avait excités ; attente trompée sous le rapport archéologique. Les clefs sont aux Turcs, sans cela les chrétiens de toutes sectes s’y déchireraient. Les gardiens couchent dedans, près de la porte, sur un divan. Pour voir l’église quand elle est fermée (et elle l’est toujours, sauf le dimanche), il faut passer sa tête par des trous pratiqués ad hoc dans la porte ; on voit alors la pierre d’onction sous ses lampes, et les bons Turcs sur leur divan ; on fait la conversation avec eux. Nous trouvons dans le