Page:Flaubert - Notes de voyages, I.djvu/380

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contre ; Hussein, que je rencontre dans la rue, me dit qu’il est parti à la Marine. Bref, après avoir drogué pendant une grande heure dans le couvent, je rengaine mon dada (sans mes bottes, l’état de mes jambes ne me le permettant pas) et, prenant avec moi ma pelisse (pour Sassetti) que je mets sur mes genoux, je pars pour la Marine, suivi de mon jeune drôle. À la porte il faut attendre dix minutes pour qu’il prenne un âne, et quand il a pris l’âne, pour qu’il change de la monnaie.

De Tripoli à la Marine, temps de galop, une belle route entre des jardins ; de temps à autre quelques femmes à cheval, à califourchon, voilées de blanc et en bottes jaunes. Mon jeune guide me suit de très loin sur son mauvais âne, je jouis du plaisir d’être seul, d’aller au galop, à cheval, en plein soleil, l’ombre du gland de mon tarbouch saute par terre, sur l’herbe mince ; avec ma grande pelisse étalée devant moi j’ai des allures majestueuses de pacha. À la Marine, le gros Mustapha-Gasis, agent français, m’aborde et me dit que la barque est prête. Je trouve Sassetti couché sur le dos sous la porte du khan, au milieu des marchandises et des chameaux qui passent, je lui fais de la limonade et je reste à attendre Maxime dans un café au bord de la mer. Là je vois encore quelques Bédouins, ce sont les derniers, et je dis aussi adieu aux chameaux.

Max revient, il court après moi depuis le matin, enfin nous nous retrouvons, nous embarquons Sassetti, à qui nous faisons un lit sur le lest de sable du bateau. — Officiers du Mercure. — Nous revenons tout doucement à Tripoli, au couvent carmélite, où nous retrouvons les officiers du Mercure.