Page:Flaubert - Notes de voyages, II.djvu/132

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fait penser à M. de Bernis, a la nostalgie et s’embête à crever ; — dans les premiers temps, faisait fermer sa fenêtre du côté de l’Acropole ; il y a plusieurs monuments d’Athènes qu’il n’a pas vus (la Tour des Vents entre autres). Admire Nisard, exècre Hugo. On a parlé littérature, le Gamin de Paris a été cité comme une bonne pièce. Ces messieurs sont ici payés par le Gouvernement pour retremper les lettres aux pures sources de l’antique !

22 janvier.

La reine de Grèce monte à cheval tous les jours et va en voiture. Elle a un costume d’amazone d’un goût rue de La Harpe. Les dimanches, elle vient sur la place écouter la musique, on la regarde, le cheval piaffe, elle le caresse de la main, après quoi, elle fait un tour sur la place au petit galop, saluant de droite et de gauche, suivie d’une demoiselle de compagnie qui a un très long nez, d’un affreux palicare, d’un gros écuyer et de deux laquais.

C’est d’une telle prostitution de soi qu’un homme un peu délicat défendrait cela à sa femme, fût-elle une ancienne danseuse de corde, élevée jusqu’à lui !

J’ai revu Sa Majesté au théâtre ; décidément elle est laide, toute la figure de même ton, œil de lapin, sourcils trop blonds, vilains cils. On dit qu’elle a une belle poitrine et une belle peau. Figure sans caractère et disgracieuse ! Sa Majesté fait six repas par jour, on ne lui donne aucun amant.

Le peuple est las d’elle, et moi aussi, sans savoir pourquoi.