Page:Flaubert - Salammbô.djvu/138

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


VII

HAMILCAR BARCA.




LAnnonciateur des Lunes qui veillait toutes les nuits au haut du temple d’Eschmoûn pour signaler avec sa trompette les agitations de l’astre, aperçut un matin, du côté de l’occident, quelque chose de semblable à un oiseau frôlant de ses longues ailes la surface de la mer.

C’était un navire à trois rangs de rames ; il y avait à la proue un cheval sculpté. Le soleil se levait ; l’Annonciateur des Lunes mit sa main devant les yeux ; puis saisissant à plein bras son clairon, il poussa sur Carthage un grand cri d’airain.

De toutes les maisons des gens sortirent ; on ne voulait pas en croire les paroles, on se disputait, le môle était couvert de peuple. Enfin on reconnut la trirème d’Hamilcar.

Elle s’avançait d’une façon orgueilleuse et farouche, l’antenne toute droite, la voile bombée dans la longueur du mât, en fendant l’écume autour d’elle ; ses gigantesques avirons battaient l’eau