Page:Flaubert - Salammbô.djvu/87

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Puis la corde se relâcha. Plusieurs fois, elle faillit se rompre.

Enfin ils arrivèrent à la plate-forme supérieure. Spendius, de temps à autre, se penchait pour tâter les pierres avec sa main.

— C’est là, dit-il, commençons !

Et pesant sur l’épieu qu’avait apporté Mâtho, ils parvinrent à disjoindre une des dalles.

Ils aperçurent, au loin, une troupe de cavaliers galopant sur des chevaux sans brides. Leurs bracelets d’or sautaient dans les vagues draperies de leurs manteaux. On distinguait en avant un homme couronné de plumes d’autruche et qui galopait avec une lance à chaque main.

— Narr’Havas ! s’écria Mâtho.

— Qu’importe ! reprit Spendius.

Et il sauta dans le trou qu’ils venaient de faire en découvrant la dalle.

Mâtho, par son ordre, essaya de pousser un des blocs. Mais, faute de place, il ne pouvait remuer les coudes.

— Nous reviendrons, dit Spendius ; mets-toi devant.

Alors ils s’aventurèrent dans le conduit des eaux.

Ils en avaient jusqu’au ventre. Bientôt ils chancelèrent et il leur fallut nager. Leurs membres se heurtaient contre les parois du canal trop étroit. L’eau coulait presque immédiatement sous la dalle supérieure ; ils se déchiraient le visage. Puis le courant les entraîna. Un air plus lourd qu’un sépulcre leur écrasait la poitrine ; et la tête sous les bras, les genoux l’un contre l’autre, allongés tant qu’ils pouvaient, ils passaient comme des flèches