chère maison, blanche dans la verdure de son jardin ; et le spectacle d’un palais ne me donnerait pas autant de convoitise ! Quelquefois vous apparaissez dans la rue, c’est un éblouissement, je m’arrête ; et puis je cours après votre voile, qui flotte derrière vous comme un petit nuage bleu ! Bien souvent je suis venu devant cette grille, pour vous apercevoir et entendre passer au bord des violettes le murmure de votre robe. Si votre voix s’élevait, le moindre mot, la phrase la plus ordinaire, me semblait d’une valeur inintelligible pour les autres ; et j’emportais cela, joyeusement, comme une acquisition ! — Ne me chassez pas ! Pardonnez-moi ! J’ai eu l’audace de vous envoyer des vers. Ils sont perdus, comme les fleurs que je cueille dans la campagne, sans pouvoir vous les offrir, comme les paroles que je vous adresse la nuit et que vous n’entendez pas, car vous êtes mon inspiration, ma muse, le portrait de mon idéal, mes délices, mon tourment !
Calmez-vous, Monsieur ! Cette exagération…
Ah ! c’est que je suis de 1830, moi ! J’ai appris à lire dans Hernani, et j’aurais voulu être Lara ! J’exècre toutes les lâchetés contemporaines, l’ordinaire de l’existence, et l’ignominie des bonheurs faciles ! L’amour qui a fait vibrer la grande lyre des maîtres gonfle mon cœur. Je ne vous sépare pas, dans ma pensée, de tout ce qu’il y a de plus beau ; et le reste du monde, au loin, me paraît une dépendance de votre personne. Ces arbres sont faits pour se balancer sur votre tête, la nuit pour vous recouvrir, les étoiles qui rayonnent doucement comme vos yeux, pour vous regarder !
La littérature vous emporte, Monsieur ! Quelle