Page:Fleischmann - Le Roi de Rome et les femmes, 1910.djvu/330

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La trompette puissante aux siècles annoncée,
Suscitera les morts dans leur couche glacée ;
Qui sait si cette voix, fertile en mille échos,
D’un peuple de soldats n’éveillerait les os ?
Si d’un père exilé renouvelant l’histoire,
Domptant des ennemis complices de sa gloire,
L’usurpateur nouveau, de bras en bras porté,
N’entrerait pas en Roi dans la grande cité ?
Tels, aux bruyants accords des cris et des fanfares,
Les princes chevelus, dans les Gaules barbares,
Paraissaient au milieu des Francs et des Germains,
Montés sur des pavois soutenus par leurs mains.


C’est ainsi que, jouet d’un songe fantastique,
Je mêlais au passé l’avenir prophétique.
L’heure avait déjà fui ; sous le long corridor
La foule s’écoulait, et je rêvais encor :
Je comptais les anneaux de cette immense chaîne
Qui lia deux captifs dans les deux Sainte-Hélène[1] ;

  1. Déjà, avant la publication de son poème, Barthélemy évoquait l’idée de cette Sainte-Hélène morale. À peine revenu de Vienne, le 20 février 1829, il publiait dans le journal Le Voleur, un article sur le duc de Reichstadt, où il écrivait : « Il est grand, élancé, mais l’effet d’un marasme précoce amaigrit trop sa taille et prive ses formes de la grâce du contour. Jeune infortuné ! Il ne respire pas aussi à l’aise que le dernier des sujets de son aïeul ; il est emprisonné dans une Sainte-Hélène morale. » Cité par Jules Garson, Les Créateurs de la légende napoléonienne... ; déjà cit., p. 39.